Thato Tsautse l’avoue volontiers : elle a un faible pour le secteur maritime. La nouvelle présidente de la Chambre de commerce et d’industrie de Durban (CCID) a de grandes ambitions pour son port, l’un des plus grands de l’hémisphère sud. « Durban est la passerelle vers les marchés africains. Pourtant, elle n’est pas la ville globalisée qu’elle devrait être », confie Thato Tsautse, blâmant au passage la résistance des entrepreneurs aux changements.
Thato Tsautse veut utiliser son mandat pour permettre à la capitale du KwaZulu-Natal de talonner la capitale économique de l’Afrique du Sud, Johannesburg. « D’accord, Durban n’a pas de matières premières, mais les activités portuaires peuvent hisser la ville au deuxième rang économique du pays », précise-t-elle. Le port de Durban possède le plus important terminal à conteneurs de l’hémisphère sud et représente le plus grand trafic maritime de l’Afrique subsaharienne. Thato Tsautse travaille au service des entreprises maritimes. Elle est la directrice générale de l’Association nationale des armateurs et des opérateurs maritimes (SAASOA) et la présidente du Comité de liaison du port de Durban. Pendant qu’elle est à la barre, la présidente de la CCID souhaite développer les activités économiques liées au trafic maritime et, en particulier, le tourisme de croisières. À l’instar du front de mer du Cap, transformé en zone d’activités et commerciale de standing, elle veut réaménager le front de mer de Durban : « On est les premiers à en avoir parlé, mais on ne l’a toujours pas fait », regrette-t-elle. Première femme élue à la tête de la Chambre de commerce de Durban, en avril 2011, Thato Tsautse entend aussi améliorer la représentation des femmes à la direction des entreprises. Elle va leur consacrer une commission à part entière au sein de la CCID.
« La chambre de Durban était en retard par rapport au reste du pays », explique cette femme de 43 ans. La parité femmes-hommes est déjà respectée au sein du Conseil d’administration, et la présidence compte deux femmes parmi ses cinq membres. L’Afrique du Sud est en effet dotée d’une des constitutions les plus progressistes au monde concernant la place des femmes dans la vie politique et économique, même si on est encore loin de l’égalité entre les hommes et les femmes. Dans la nation arc-en-ciel, 17 % des membres des directions des sociétés cotées en bourse sont des femmes, contre 10 % en Europe.
Cette année, la CCID a donc fêté sa première présidente, ainsi que son 155e anniversaire. Forte de 2 900 membres, la chambre de Durban est la deuxième plus importante CCI du pays. Les membres élisent un conseil d’administration d’une vingtaine de personnes qui votent à leur tour pour désigner la présidence. La CCI joue à la fois le rôle de lobbyiste, pour défendre les intérêts des entreprises auprès des pouvoirs publics, et celui de prestataire de services. La nouvelle présidente souhaite, en particulier, développer les partenariats entre la chambre et ses membres. « Il s’agit d’utiliser leurs compétences pour définir nos stratégies et améliorer notre fonctionnement en utilisant, par exemple, l’expertise des juristes, des comptables, des architectes, etc. », précise Thato Tsautse.
Un autre projet lui tient à cœur : élargir les zones géographiques couvertes par la chambre. Ce sont surtout les compagnies du centre ville qui sont représentées, alors que la métropole de 3,5 millions d’habitants englobe de nombreuses zones urbaines. L’ancienne conseillère juridique de la municipalité connaît bien Durban. Après les premières élections libres en 1994, Thato Tsautse a été chargée de fusionner différentes municipalités en une seule. La nouvelle présidente de la CCID est diplômée en droit et a travaillé comme juriste dans diverses compagnies et, en particulier, dans l’industrie maritime. « Ma carrière de juriste m’a donné une éthique, la volonté de représenter l’intérêt de mes clients. » Interrogée sur la politique économique nationale, Thato Tsautse donne la priorité à la création d’emplois quand le chômage touche un quart de la population. « Le thème de la politique nationale cette année est l’emploi, et nous poussons le gouvernement à définir sa politique main dans la main avec les entreprises », dit la présidente de la CCID. « L’amélioration des infrastructures est aussi nécessaire au développement économique. Pour Durban, il y a un enjeu particulier sur le fret ferroviaire, complémentaire du fret maritime », insiste-t-elle.