Les faiseurs de mode les conseillent sans modération : il y a de la fraîcheur et un brin de légèreté dans l’air. La liberté des marins et la puissance des océans se reflètent dans les rayures que la mode nous propose ce printemps sous toutes les variations possibles, surtout pour l’homme. Cependant, ce n’est pas toujours si réussi. évitez par exemple, les costumes à larges rayures, vous auriez l’air d’un prisonnier d’un autre temps. Les rayures verticales du pyjama-de-papa suffisent sur le beau manteau printanier. Elles flottent aussi sur des shorts trop larges. La marinière, empruntée aux pêcheurs de Deauville par mademoiselle Gabrielle Chanel au début du XXe siècle, redevient la pièce maîtresse du vestiaire masculin estival. Tee-shirt, chemise et pull-over invitent aussi à ce voyage rétro. Car, en effet, il ne faut pas croire que ces rayures en bleu marine et blanc ont été lancées par Jean Paul Gaultier dans les années 1980.
Certes, en 1987, le grand gaillard à la banane blonde platine aima chiner à Camden Markets, à Londres, dans un sweat-shirt à rayures ; et en effet, par la suite, le couturier français a su lancer le marin chic et sexy, bandant ses pectoraux sous la moulante marinière. Mais les rayures étaient déjà tout à fait dans le « mood » vers les années 1900. D’ailleurs, la fashion victim de l’époque, le prince de Galles et futur roi d’Angleterre Edouard VII, s’affichait volontairement en costume clair à rayures sombres. En 1914, toujours à Londres, les employés de bureau adoptèrent ces nouvelles chemises souples avec col et manchettes amovibles, si possible décorées de rayures. La mode actuelle des larges bandes horizontales sur les pull-overs et les tee-shirts existait également il y a cent ans : c’était la tenue des équipes de football américaines. Les blazers à rayures verticales ainsi furent portés par les joueurs de cricket qui ont lancé les premières tenues décontractées dans les années 1920. Les vedettes du cinéma en raffolaient. Enfin, en 1931, le duc de Kent s’est fait photographier dans un costume à rayures assorti à des chaussures bicolores et au canotier. Bref, les goûts de tout ce petit monde d’antan reviennent donc à la mode. Les chaussures bicolores sont juste remplacées par des espadrilles à rayures pastel. Dolce&Gabbana fait glisser les bandes colorées sur les boxers, les maillots de bain et les sweat-shirts dans une version moulante très rétro 1950.
Le duo italien propose également de soyeux pyjamas pour la plage ou la maison. Le micro-slip à rayures émeraude, de Dsquared2, fera sans doute fureur sur les sables de l’Adriatique tandis que les écharpes en coton léger et les marinières traditionnelles se porteront, chez Iceberg, avec un costume gris clair. De son côté, Giorgio Armani glisse ces lignes blanches comme un trait de craie sur les manches de tee-shirts moulants dans de rafraîchissantes teintes jaune citron, citron vert ou anis. Il faut effectivement lâcher prise et participer à cette sympathique légèreté du moment qui donne le vertige chez Prada. La maison milanaise lance, pour cet été, les vieux pulls de ski des années 1950 à manches raglan, en marinière et décorés au tour du cou de rayures jaunes, vertes, oranges, bleues, lie de vin et noires. Les pull-overs deviennent franchement psychédéliques chez Jil Sander, sans parler de ceux à manches courtes et au col V de l’Anglaise Vivienne Westwood, beaux et virils, en émeraude et noir. à Paris, c’est Kenzo qui fait revivre le blazer bleu à rayures bleu des joueurs de cricket du début du XXe siècle. Enfin, Jean Paul Gaultier, encore lui, n’oublie pas sa pièce de prédilection : sa marinière 2011 est en maille ultrafine, très citadine, assortie au pantalon blanc et aux chaussures blanches.