Depuis le début de la crise, en 2008, l’Europe a perdu trois millions d’emplois. Ce constat alarmant n’est que l’un des nombreux points noirs au tableau économique de l’Union européenne. La production industrielle ne cesse de reculer dans la plupart des pays. Entre 2010 et 2011, elle a baissé, selon Thomson Reuters, de 2,2 % au Portugal, de 1,8% en Espagne et de 0,7 % en Italie. Toujours selon les mêmes données, la progression n’a été que de 1,7% en France.
Bien qu’aucun bilan consolidé ne soit encore paru pour l’année écoulée, la situation est assez préoccupante pour engager les ministres de l’Economie et de l’Industrie de cinq pays européens dans une démarche inédite. En avant-première du sommet européen de Bruxelles en décembre dernier, ils ont lancé un appel pour stopper le processus de désindustrialisation, dépassant ainsi les positions respectives que détient chacun de leur pays en matière de politique industrielle. « La production industrielle de l’Europe a diminué de 10 % depuis le début de la crise », s’alarment les ministres de l’Economie et de l’industrie espagnol, français, italien, portugais et allemand. Ils insistent par ailleurs sur la fonction déterminante des entreprises dans la relance économique, la croissance et la création d’emplois. Ce renouveau industriel passe selon eux par une meilleure compétitivité des entreprises européennes et par un élargissement des domaines d’activités pour faire face aux défis de la globalisation. Ils appellent également les entreprises, les scientifiques et les étudiants à se mobiliser pour l’innovation en Europe.
Repositionner les entreprises industrielles
En retour, les ministres se prononcent en faveur d’ « un examen constructif des politiques européennes qui ont un impact sur la compétitivité industrielle. » Ils reconnaissent que les institutionnels ont également un rôle à jouer pour renforcer le contexte économique des entreprises. L’appel des cinq ministres se réfère à une note stratégique de la commission européenne, parue en octobre dernier. Orientée sur une réindustrialisation de l’Europe, elle définissait comme objectif principal de rehausser la part détenue par l’industrie au sein du PIB européen de 16 % actuellement, à 20 % en 2020. « Notre réussite future doit reposer sur un modèle de croissance forte, diversifiée et durable, dans lequel l’industrie est appelée à jouer au premier plan », ont confirmé les cinq ministres européens en charge de l’Industrie. S’ils se félicitent de cette prise de conscience au niveau de la commission, les ministres adressent dans leur message le souhait de voir se consolider « les règles du marché unique, les politiques en matière de concurrence, de commerce, d’environnement, de cohésion, d’innovation et de recherche et l’encadrement des aides d’Etat. » Selon eux, l’Europe doit jouer un rôle-clé pour l’emploi.
Priorité énergétique
La poursuite de ces objectifs est cependant conditionnée à d’autres mesures, notamment à des politiques sectorielles comme celle de l’énergie. Comme Günther Oettinger commissaire à l’Energie et Antonio Tajani, commissaire à l’Industrie, auteurs de ces recommandations, les cinq ministres de l’Economie et de l’Industrie soulignent dans leur appel le rôle primordial de la politique énergétique. L’énergie constitue l’un des piliers essentiels de la compétitivité européenne, au même titre que la qualification de la main d’oeuvre, la protection de la propriété intellectuelle ou encore le prix des matières premières. Or, le prix de l’énergie est devenu dans l’ensemble des pays européens le deuxième facteur de coûts des entreprises industrielles après les frais de main d’oeuvre. Comme l’ont remarqué les deux commissaires « Aucune amélioration n’est aujourd’hui en vue. Le prix de l’énergie en Europe, l’un des plus élevés d’Europe, devrait encore augmenter». Un sujet d’inquiétude pour le monde économique, et qui devrait constituer l’un des principaux dossiers de l’Union européenne dans les mois à venir.