En quittant l’aéroport de Dalian, à une heure au nord-est de Pékin (18 vols quotidiens), on plonge en 10 minutes au cœur de ce « Pékin-Plage » de la côte pacifique qui héberge 620 sociétés informatiques – dont 230 entreprises étrangères – et emploie quelque 40 000 salariés. « En 1998, c’était une petite ville »,indique Cabell Chen, responsable commercial de Dalian Software Park (DLSP), l’opérateur privé de la Silicon Valley chinoise. « Dalian compte 6 millions d’habitants, 26 universités et instituts de technologie, 810 000 étudiants, dont 31 000 ingénieurs en informatique par an. » Soit presque autant qu’à Bangalore, sa grande rivale indienne. À l’instar de la capitale du Karnataka en Inde, Dalian a conquis dans les années 1990 ses lettres de noblesse à l’export grâce au Business Process Outsourcing (BPO).
Au profit de grands groupes internationaux, cette industrie « off-shore » externalise auprès d’opérateurs spécialisés des fonctions (ou processus) comme la comptabilité, la paye, la facturation, le service client ou la maintenance informatique. L’argument choc de Dalian : les coûts salariaux sont nettement moins élevés qu’en Inde. « En Inde, un débutant en BPO empoche 225 dollars par mois », détaille Ronnie Sengupta, directeur général de Type-i, une société indienne de BPO à Mumbai. Ici, le même opérateur débutant touche 100 dollars par mois… Par ailleurs, les salaires des « BPO People » et des informaticiens indiens augmentent de 15 % à 20 % par an. Pire, le turn-over du personnel indien, appelé « attrition », varie entre 25 % et 50 % par an. De leur côté, les autorités chinoises officielles avancent des taux annuels d’augmentation salariale de 5 % à 10 % et une attrition de 12 %.
Des salaires 60 % moins élevés qu’au Japon
CSK, Hitachi, Mitsubishi, NTT, NEC, Omron, Panasonic ou Ricoh… ce sont les grands groupes japonais et sud-coréens qui ont suscité ce marché de l’off-shore. « 100 000 personnes parlent couramment japonais », poursuit Cabell Chen. À partir de 1999, les prestations informatiques sont montées en gamme avec le développement d’applications logicielles (40 % des emplois de la Silicon Valley chinoise aujourd’hui), suivies par le développement de l’informatique embarquée (10 %) et l’externalisation de programmes de recherche et développement (5 %). On trouve aussi de l’externalisation de services en CAO (Conception assistée par ordinateur). « Ici, les salaires sont 60 % moins élevés qu’au Japon », confie Mika Koguchi, directrice générale de la filiale de Dalian du Japonais Transcosmos Design Development, qui réalise ici des prestations de CAO pour le compte d’architectes nippons spécialisés dans la construction de maisons et de villas. Reste que la taille des « champions » informatiques chinois n’excède pas les 10 000 employés, de trois à huit fois moins que les groupes indiens comme TCS, Infosys, Wipro ou Satyam. « Dalian a démarré 30 ou 40 ans plus tard que l’Inde », indique Mason, le directeur général d’iSoftStone qui développe des logiciels, entre autres choses pour BT. « Mais, depuis notre création en 2001, notre croissance est très rapide. Nous comptons doubler nos effectifs à 10 000 salariés pour la fin 2008 ! » Une chose est sûre : la Chine ne se contente plus d’être l’usine du monde. Elle veut aussi devenir sa salle informatique.