Le groupe Accor se redéploie en Amérique latine

148
Premier groupe hôtelier européen, Accor est fortement implanté sur le continent sud-américain. Pas encore assez semble-t-il, puisque la direction régionale s’est lancée dans une ambitieuse phase d’expansion.

Accor connaît bien le Brésil. Installé depuis 2006 dans le pays, Stéphane Engelhard, directeur financier du groupe pour l’Amérique latine, peut en parler longuement. « Le Brésil a constitué notre base de développement en Amérique Latine. Dès 1976, nous nous sommes lancés avec Ticket-Restaurant. Au lieu de recevoir des tickets, les travailleurs disposaient d’une somme, de la valeur des repas, qu’ils pouvaient utiliser pour d’autres dépenses que l’alimentation. Le succès fut immédiat. » Lancée un an plus tard, l’activité d’hôtellerie n’a pas eu le même destin. Instable économiquement dans les années 1980 et 1990, le contexte brésilien présentait les conditions d’un « impossible développement » du secteur. Mais, fort de son succès dans les services, le groupe choisit de maintenir son implantation. Survenue ces dernières années, l’amélioration attendue au Brésil, comme dans d’autres pays, permet aujourd’hui à Accor Amérique latine d’afficher d’importantes ambitions.

 

À la fin des années 1990, le groupe a initié une démarche industrielle pour le lancement des marques Ibis, Formule 1 et Novotel. La marque Sofitel, déjà présente dans le Nordeste depuis une quinzaine d’années, est de plus en plus implantée dans les grandes villes du pays. Actuellement, le Brésil compte 45 établissements Ibis et 5 Formule 1. « Alors que les clients étaient de plus en plus nombreux à réclamer des chambres de bonne de qualité à moindre coût, aucune offre n’était proposée sur ce segment », explique Stéphane Engelhard. La clientèle est essentiellement brésilienne et de toutes origines sociales. Car, outre le prix, l’atout majeur de ces hôtels est leur localisation. Ainsi, l’homme d’affaires de passage à São Paulo qui achève sa journée à 21 heures et doit s’envoler tôt le lendemain pour une autre grande ville apprécie de loger dans l’hôtel Ibis (de 300 chambres) situé à proximité de l’aéroport. Dans les Novotel et Mercure, de gamme supérieure, la clientèle est à la fois nationale et régionale (pays voisins). Enfin, les établissements Sofitel accueillent essentiellement des voyageurs internationaux et des Brésiliens de classes sociales très favorisées.

 

Depuis 2005, l’économie de certains pays, comme l’Argentine, s’est réellement améliorée et le groupe français peut désormais voir plus loin que des objectifs à court terme. « Auparavant, si la possibilité de mettre en place ou de reprendre un hôtel, quelle que soit la marque, se présentait, nous nous lancions – ou pas – après étude poussée. » Désormais, une véritable logique de développement prédomine avec la création de réseaux Novotel et Ibis. Dans le premier cas, il s’agit de satisfaire la clientèle régionale, que ce produit attire, au sein des grandes villes du Brésil, de l’Argentine, du Chili, du Pérou, de la Colombie, du Venezuela et les capitales d’autres pays d’Amérique latine. Concernant Ibis, le groupe vise les mêmes pays, où la clientèle nationale constitue la principale cible. « Ici encore, la demande augmente sans être accompagnée d’une offre importante. En Argentine, par exemple, le taux de croissance avoisine les 10 % depuis 2002.

 

La classe moyenne se reconstitue, les hommes d’affaires courent d’un point à un autre du territoire : le besoin est énorme. Au Chili, qui n’a pourtant pas connu les mêmes difficultés économiques que l’Argen-tine dans les décennies précédentes, le manque se fait également sentir », poursuit le directeur financier d’Accor Amérique latine. Sofitel viendra compléter ces deux réseaux, mais uniquement dans les capitales de quelques États – dont Santiago, Caracas et Mexico. Engagé dans une stratégie de développement touristique, le gouvernement de Luiz Inácio Lula fait parfois appel, au travers de consultations et de conseils sur certains projets, à l’expertise du groupe Accor pour appuyer son action. Sur ce territoire gigantesque, dont la superficie représente 14 fois celle de la France, il existe un manque considérable d’infrastructures. Les régions industrialisées, au sud – de São Paulo jusqu’à la frontière avec l’Uruguay, grossièrement – ont une classe moyenne importante qui voyage pour ses vacances dans le Nordeste.

 

« L’état des routes freine ces flux, le système de contrôle aérien s’avère précaire. Au même moment, la clientèle nationale bénéficie de la valorisation du real par rapport à l’euro et au dollar. Il est donc souvent plus intéressant pour elle de voyager à l’international que dans son pays ! » Le géant lusophone ne reçoit donc aujourd’hui que 5 millions de touristes par an, alors qu’il présente un potentiel majeur – la France accueille environ 70 millions de visiteurs. Outre l’hôtellerie, Accor a développé ses activités de services dans 8 pays du continent sud-américain, qui représentent aujourd’hui 2 milliards d’euros de volume d’affaires. Au Brésil, le groupe français a développé le Ticket Restaurante, le Ticket Alimentação, le Ticket Car, le Ticket Transporte, le Ticket Seg, Build up (solutions RH) et Accentiv (produits de récompense et de motivation). La restauration collective est aussi présente dans ce pays dans le cadre de la JV GR SA, 50/50 Accor Brésil et Compass Group.

Article précédentLycée français de Mexico, un allié pour le développement de la présence française au Mexique
Article suivantL’enseigne des belles plantes