Projet européen ACCIS : du rêve à la réalité

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Depuis sa formulation par la Commission en 2001, l’idée d’établir une assiette commune consolidée de l’impôt sur les sociétés (ACCIS) a suscité interrogations et scepticisme.

 

Force est de constater qu’après sept ans de réflexion, ce projet est en passe de faire l’objet, au cours du second semestre 2008, d’une proposition de directive dont Christine Lagarde a déjà dit qu’elle serait alors une priorité de la présidence française. Le projet ACCIS vise à permettre à des sociétés membres d’un même groupe et localisées dans différents États membres du territoire communautaire:

– d’établir leur base d’imposition à l’impôt sur les sociétés selon des règles identiques

– de dégager un résultat imposable unique au niveau du groupe, fruit de la somme algébrique des résultats et déficits de chacune des entités, et dont une quote-part sera attribuée à chaque État membre selon un mécanisme de répartition (fonction de trois facteurs : main-d’œuvre, actifs et ventes) pour faire l’objet d’une imposition à son propre taux

– de déclarer ce résultat auprès d’une seule administration

La Commission considère que l’ACCIS doit être, dans un premier temps, optionnelle pour les entreprises, mais que la société mère n’aura pas le choix dans la fixation du périmètre du groupe : dès lors qu’elle opte, elle devra obligatoirement intégrer ses filiales détenues à 75 % au moins.

Dans l’ensemble, les règles de détermination de l’assiette seront proches de celles connues des entreprises françaises, à l’exception de celles relatives notamment aux amortissements. Le régime aura essentiellement un double avantage : d’une part permettre une compensation au sein du territoire communautaire, très largement limitée aujourd’hui, entre les bénéfices et les pertes des différentes entités du groupe ; d’autre part simplifier le quotidien des relations intragroupes en faisant notamment disparaître les difficultés de facturation entre filiales.

Ce sont des atouts formidables pour des entreprises s’implantant dans d’autres États membres ou y exportant. Ces problématiques de compensation des pertes ou de prix de transfert subsisteront néanmoins dans les relations avec les entités hors Union européenne… et celles présentes dans des États communautaires qui n’accepteraient pas l’ACCIS.

C’est là la principale faiblesse du projet : à défaut d’unanimité pour le projet, il ne pourra être adopté que par certains États, sous la forme dite de la « coopération renforcée ». Mais plus il y aura d’États en dehors de cette coopération, moins le régime sera intéressant pour des entreprises présentes largement sur le territoire communautaire qui devront continuer à gérer plusieurs corps de normes fiscales. Quoi qu’il en soit, l’option pour l’ACCIS se prépare dès maintenant, par un travail de simulation seul à même de déterminer les gains potentiels pour un groupe européen.

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