Aujourd’hui Airbnb est devenu un incontournable pour la location de logements de particuliers en vacances et cet été la plateforme est en passe de battre de nouveaux records de réservations. Mais à l’image du fameux conflit entre les chauffeurs de taxis et la plateforme Uber, Airbnb est à l’origine d’une certaine indignation -pour ne pas dire un réel mécontentement- chez les professionnels de l’hôtellerie qui voient dans cette nouvelle méthode de se loger ponctuellement, une concurrence déloyale.

Fondé en 2008 par Brian Chesky, Joe Gebbia et Nathan Blecharczyk, Airbnb est devenu le leader de la location de logements de particuliers, avec plus de 2 millions d’annonces dans le monde d’appartements, de maisons et chambres à louer, disponibles sur la plateforme, et 300.000 annonces en France. 3,9 millions de voyageurs et 4,1 millions de Français sont passés par Airbnb entre septembre 2014 et août 2015. En 2016 la valorisation boursière de la plateforme a atteint les 30 milliards de dollars (26 milliards d’euros) et son chiffre d’affaires avoisine le milliard et demi.

Jusqu’à 25.000€ d’amende pour les loueurs qui fraudent

Cette spectaculaire émergence a bouleversé l’écosystème du tourisme mondial et complètement chamboulé les méthodes de voyages des touristes du monde entier. Une raison pour laquelle il sera désormais obligatoire à Paris (ville la plus visitée au monde), à compter du 1er décembre 2017, de s’enregistrer en mairie pour louer son meublé touristique, avec une limite de 120 jours par an de location, sous peine de sanction pouvant aller jusqu’à 25.000€ d’amende. En cause, la gronde des hôteliers dans les grandes villes qui ne supportent plus cette concurrence avec les plateformes de petites annonces comme Airbnb ou encore Booking. La plateforme Airbnb enregistre à elle-seule plus de 65.000 logements disponibles sur Paris.

«Le problème, c’est que nous avons dans un certain nombre de quartiers de Paris un développement anarchique des meublés touristiques et des immeubles entiers qui sont transformés en hôtels clandestins. Nous souhaitons mettre un terme à cela», déclare Ian Brossat, adjoint PCF à la mairie de Paris en charge du logement. Nice et Bordeaux ont voté la même interdiction pour limiter les abus.

Un phénomène qui ne se limite pas aux villes purement touristiques

Même des villes qui, à première vue n’évoquent pas l’idée même du haut-lieu touristique, sont concernées par le phénomène Airbnb. Ainsi Clermont-Ferrand dispose pour tous les soirs de l’année d’une offre de plus de 350 annonces Airbnb qui font concurrence directe avec les hôtels de la ville. De quoi s’inquiéter quand on est hôtelier.

Le conseil communautaire de Clermont Auvergne Métropole va de son coté percevoir la taxe de séjour collectée par la société Airbnb auprès des logeurs clermontois sur sa plateforme, à hauteur de 0.40€ par nuit et par personne. La direction tourisme va mettre en place une procédure technique pour collecter la taxe par le biais d’une plateforme de télé-déclaration en ligne. Celle-ci permettra aux propriétaires de régulariser leur déclaration de taxe de séjour si leur location est soumise à un tarif supérieur à celui collecté par Airbnb.

Martine Courbon, la présidente de l’UMIH Puy-de-Dôme (Union des Métiers et des Industries de l’Hôtellerie), explique que «c’est une bonne nouvelle car si des particuliers dépassent une certaine somme, ils devront déclarer cela comme des revenus. Et ils vont être répertoriés. (…)  deux cents chambres louées par soir à Clermont, c’est l’équivalent de deux hôtels, soit 80 emplois. Sans compter les sous-traitants…»

Le directeur d’un établissement Hollyday Inn, hôtel 4 étoiles déclare : «Nous, nous sommes soumis à des contraintes, à des taxes, à tout un tas d’obligations qui ne touchent pas les personnes qui mettent en location des chambres sur Airbnb. Nous connaissons le cas d’une personne qui au début avait mis une chambre en ligne. Aujourd’hui, il en a dix. Il en vit très bien et surtout il n’a aucune contrainte.»

Les maires des grandes villes se battent contre Airbnb dans le monde entier

Et le phénomène affecte toutes les grandes villes du monde, de New-York à Berlin, en passant par Rome et Barcelone. Ada Colau, le maire de Barcelone s’est battu depuis des mois avec le site de réservation. Son combat est suivi par la population locale alors que le tourisme fait vivre la ville. Comme à Paris, les quartiers historiques et très prisés du centre-ville ont tendance à se vider de leurs habitants avec un nombre en explosion de logements touristiques meublés, ce type de location étant bien plus lucratif que la location classique.

Des fonds immobiliers ont même racheté des immeubles entiers afin de les louer uniquement aux touristes et de bénéficier de la très forte rentabilité dont bénéficie ce secteur. La mairie qui ne souhaite pas voir son coeur historique se vider, a déjà imposé des contraintes similaires à celles que va mettre en place Paris. Airbnb se défend avec des chiffres : 1.3 million de personnes sont passés par Barcelone en 2016 grâce à la plate-forme, les propriétaires auraient ainsi dégagé 167 millions d’euros pour les propriétaires, et 860 millions d’euros seraient partis dans les commerces locaux. Seul bémol : de l’objectif initial de complément de revenus pour les propriétaires, nous sommes arrivés au déploiement d’un véritable business à grande échelle, avec ses dommages collatéraux.

Le géant du locatif 2.0 a du accepter, après des mois de bras de fer, et pour échapper à une amende de 600.000€ de collaborer avec la mairie de Barcelone et de retirer les annonces d’appartement sans licence municipale. Airbnb n’est pas la seule plateforme à avoir plié face à la mairie de Barcelone, ainsi TripAdvisor, Booking, Homeway ou encore Rentalia ont également été contraint de mettre de l’ordre en éliminant les offres illégales.

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