La célèbre agence de notation financière Moody’s a déclassé la note de la Chine suite au ralentissement de la croissance nationale et à l’augmentation exponentielle de son endettement. Cette rétrogradation est une première pour l’Empire du Milieu depuis 1989.

Certes la Chine a fait un gigantesque bond économique ces trente dernières années, et tous les « prophètes » de l’économie ont toujours pris soin de mettre en garde contre l’ogre chinois qui s’apprêtait à « bouffer » tout le reste de la terre du jour au lendemain… mais il est également de notoriété publique que ce formidable développement a ses propres faiblesses, ses pieds d’argile, des pans entiers d’instabilité économique, de toxicité financière qui pourraient porter un coup fatal à l’Empire du Milieu par le biais d’une crise incontrôlable. Envolée des dette, bulle immobilière (les « villes neuves » aux chantiers permanents mais toujours inhabitées -le seront-elles un jour?- pullulent), shadow banking, et maintien d’entreprises publiques lénifiantes qui auraient fermées depuis des années si elles n’appartenaient pas à l’Etat… Ces risques à fort potentiel inquiètent, à raison, et cette inquiétude s’est manifestée via Moody’s qui a dégradé l’appréciation qu’elle porte sur la solidité de la dette souveraine chinoise, la dette émise par l’Etat chinois.

Une première en 30 ans

Jusque là, la note de la Chine était de « A1 », la quatrième meilleure note possible sur une grille en comportant 21, et désormais elle est de « AA3 », cinquième meilleure place. Pour comparaison la France, qui a longtemps été évaluée avec la meilleure note « AAA » jusqu’en 2012, détient la troisième meilleure note « AA ». On pourrait supposer que cette rétrogradation chinoise soit sans gravité, tel un élève habitué aux A+ qui un jour se verrait attribuer un A-, mais la Chine n’avait pas vu sa note bouger depuis 1989 et les évènements de la place Tian’anmen. Preuve que la situation économique actuelle n’est donc pas totalement sereine, et qu’il est sans doute préférables de le faire savoir aux investisseurs étrangers.

Pékin n’apprécie pas cette réévaluation

Preuve aussi que cette dégradation est significative et impactante, les autorités chinoises n’ont pas tardé à faire savoir leur mécontentement et ont critiqué une méthodologie jugée inappropriée de la part de l’agence de notation. Mais Moody’s confirme son évaluation : « La solidité financière de la Chine va s’éroder ces prochaines années, avec une dette déjà très importante qui continue d’augmenter et une croissance qui ralentit ».

Les autorités chinoises ont, selon l’agence, pris de bien mauvaises habitudes pour maintenir un taux de croissance qui décline année après année en encourageant de façon excessive l’octroi de crédit. De plus les diminutions des dépenses d’investissement, la baisse de la population active et le ralentissement des gains de productivité sont autant de constats alarmants qui ne feront que faire fondre un peu plus un taux de croissance national qui est passé de 10,6% du PIB en 2010 à 6,7% en 2016 et est estimé à 5% du PIB dans les cinq prochaines années.

Ne vendons pas la peau du « Dragon chinois» avant que celui-ci n’ait joué toutes ses cartes

Bien entendu la dette chinoise va continuer de s’aggraver, en partie à cause des politiques conciliantes et généreuses mises en place. Rappelons que les créances totales de l’Etat, des provinces, des entreprises publiques, des ménages sont à plus de 250% du PIB, ce qui fait dire aux analystes de Moody’s que certes, ce niveau d’endettement est constaté dans d’autres pays, mais des pays avec des marchés financiers plus importants et des institutions plus solides que celles de la Chine, et donc des pays mieux armés pour rembourser leur dette et « gérer » une crise potentielle et contagieuse. Est-ce que la prochaine crise économique mondiale viendra de Chine ? C’est justement cette éventualité qui résonne dans le crâne de bon nombre d’analystes.

Cela dit, si l’agence de notation ne l’a rétrogradé que d’une place c’est que la Chine garde toujours dans sa manche divers atouts pour rééquilibrer la balance. Les plus rassurants de ces atouts : un taux d’épargne des ménages idéalement élevé puisqu’il atteint les 40 % des revenus, donc de l’argent réinvestit localement et capable de rembourser de nouvelles dettes ; trois mille milliards de réserves de change de la banque centrale ; ou encore une dette extérieure, qui peut-être remboursée en d’autres devises que le Yuan, qui ne représente que 12,7% du PIB.

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