Présent dans 17 pays, le groupe franco-britannique Perenco, qui produit aujourd’hui 240 000 barils par jour (équivalent pétrole et gaz), a choisi le nord-est de l’Amazonie péruvienne pour entreprendre un nouveau projet pétrolier. « Travaillant déjà au Guatemala, au Venezuela, en Colombie, au Brésil, au Belize et, jusqu’à il y a peu, en Équateur, nous avons de l’expérience en Amérique latine et avons trouvé cette offre de développement intéressante », raconte Daniel Kadjar, directeur de la filiale de Perenco au Pérou. Durant les quatre prochaines années, Perenco investira donc de 1,5 à 2 milliards de dollars (soit 1 à 1,4 milliard d’euros) pour développer ce qui est devenu l’un des plus grands projets pétroliers du pays : le potentiel de réserve du « bloc 67 », sur lequel se concentre la compagnie, est estimé à 300 millions de barils, soit un potentiel de production de 100 000 barils par jour, que Perenco prévoit de produire dès mi-2013. Perenco est arrivée au Pérou en janvier 2008 en rachetant les actions de Barrett Resources LLC, une société détenant des permis d’exploitation pétrolière et gazière au Pérou, et a acquis des droits dans trois concessions situées au cœur de l’Amazonie : le « bloc 125 » est depuis passé aux mains de Perupetro (Pérou), mais Perenco reste concessionnaire du « bloc 67 » et à 50 % du « bloc 121 ».
Situé au nord-est du Pérou, dans le bassin du Marañon, en lisière de l’Équateur et à 1 h 30 d’hydravion ou d’hélicoptère de la grande ville d’Iquitos, le « bloc 67 » a fait l’objet de toutes les attentions de Perenco qui a poursuivi le travail de son prédécesseur. « Le bloc original, qui a été attribué en 1995, était huit fois plus grand que le bloc actuel, car au fur et à mesure qu’avancent les explorations, on se concentre sur certaines surfaces », souligne Daniel Kadjar. Conséquence : alors que le « bloc 67 » représente une superficie de près de 100 000 ha, Perenco travaille aujourd’hui sur quelque 500 ha dispersés sur l’ensemble du territoire, soit moins de 0,5 % du bloc. À la profondeur des gisements, l’usage de forages directionnels permettra d’atteindre une surface plus importante. La phase de développement a débuté. Deux équipes de forage travaillent pour faire des puits de délinéation et deux puits ont déjà été forés sur les neuf prévus. « Nous sommes dans la partie ingénierie de la phase de développement : une campagne de forages de délinéation est en cours pour prélever des échantillons d’huile, car c’est une huile lourde – de l’ordre de 14 degrés API (normes American Petroleum Institute, ndlr) – et il faudra utiliser des procédés spéciaux pour en faciliter le transport », explique le directeur de Perenco Pérou. Le groupe prévoit aussi de construire d’ici 2013 un oléoduc de 200 km qui permettra de relier le « bloc 67 » à la station d’Andoas, à 1 500 km de Lima, de l’oléoduc nord-péruvien de Petro-Peru qui transportera le pétrole jusqu’au port de Bayovar, à Piura, sur la côte Pacifique nord du Pérou.
Forte de son expérience dans les forêts tropicales du Gabon ou sur les terres voisines de Colombie et d’Équateur, la compagnie n’a jusque-là pas rencontré de problèmes pour mener à bien ses travaux au cœur de l’Amazonie péruvienne. « Il y a surtout des exigences logistiques à prendre en compte, comme le transport par hélicoptère, pour minimiser les impacts sur l’environnement », indique Daniel Kadjar. Toute une série de normes et de procédures sont de fait mises en place pour réduire l’impact de l’extraction pétrolière sur l’environnement. « On fore par exemple des puits déviés depuis des plates-formes centrales, ce qui permet de réduire les surfaces utilisées et les effets que pourrait avoir l’activité sur ces espaces », explique le directeur. L’eau, qui est produite en même temps que le pétrole, va être réinjectée en profondeur dans les couches géologiques dès le début des opérations, tandis qu’en fin de projet – la concession est attribuée pour trente ans –, Perenco s’engage à tout démonter et reboiser à l’aide d’experts en accord avec la loi péruvienne et les plus hauts standards internationaux. Chaque étape est contrôlée de près par le gouvernement péruvien, qui exige que l’entreprise réalise une étude d’impacts socio-environnementaux pour tout nouveau développement ou phase de forage.
« Cette étude, qui dure un à deux ans, commence par l’acquisition de données sur le terrain afin de décrire l’environnement dans lequel nous allons travailler », précise Daniel Kadjar qui connaît bien la législation péruvienne sur les hydrocarbures. Une fois le projet présenté au ministère, l’entreprise doit organiser un processus de consultation auprès des villageois vivant dans l’aire du projet et des audiences publiques sont organisées. « Nous devons alors prendre en compte les commentaires des gens durant ce processus pour faire un projet minimisant les impacts socio-environnementaux », souligne le directeur de Perenco qui insiste sur la volonté de son entreprise d’« entretenir de bonnes relations avec ses voisins ». Le premier village se trouve à 50 km de la base de Curaray, où ont lieu les forages. Cependant, pour Daniel Kadjar, il est important que Perenco contribue à améliorer les conditions de vie des communautés de la région « en respectant complètement leur culture » : « Avec les communautés de la région et en liaison avec le gouvernement, nous avons mis en place un plan d’assistance médicale et dentaire. » L’entreprise pétrolière les aide aussi à maintenir leurs valeurs en finançant l’élaboration de livres dans leur langue, qui est menacée de disparition, et d’autres projets de développement durable (pisciculture…) sont mis en place avec les villageois.
« Notre investissement en Amazonie péruvienne est important pour le groupe, mais aussi pour le Pérou », dit Daniel Kadjar qui estime que « ce projet va avoir des retombées économiques importantes pour le pays et lui permettre de faire un pas vers l’indépendance énergétique. » En avril dernier, le président péruvien Alan Garcia a confirmé l’intérêt de son pays en recevant personnellement le président de la compagnie, François Perrodo, au Palais du gouvernement, à Lima. « C’est aussi un projet qui donne du travail aux Péruviens et aux gens de la région », indique le directeur. Perenco Pérou emploie aujourd’hui directement 175 personnes, et près de 600 travailleurs à travers une quarantaine de compagnies. Confiant dans le succès de son projet, Perenco pense travailler sur un potentiel d’exploration supplémentaire sur le « bloc 67 », ainsi qu’explorer le « bloc 121 ». « Et s’il y a d’autres opportunités au Pérou, nous les évaluerons », confie Daniel Kadjar, pour qui le pays andin présente de nombreux avantages : « Le Pérou est un État de droit, bien organisé, qui s’est doté d’une législation stricte dans le domaine des hydrocarbures. Un pays qui souhaite progresser tout en respectant l’environnement et les communautés, ce qui nous paraît très bien. » Et le directeur de conclure : « Perenco est un opérateur responsable qui fait un travail de qualité dans le respect des plus hauts standards environnementaux et, en tant que tel, nous souhaitons travailler dans ce cadre que propose le Pérou. »