Commerce franco-israélien: « Des obstacles culturels côté Français »

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Le constat est plutôt décevant : avec un volume d’échange inférieur à 2 milliards d’euros, la France n’est aujourd’hui que le 10e fournisseur d’Israël (9e en 2009) et son 9e client (7e en 2009), hors commerce de diamants. Les exportations tricolores en Israël ont atteint l’an dernier 1,16 milliard d’euros, soit une part de marché de l’ordre de 3 %, tandis que les importations françaises sont passées à 0,93 milliard d’euros. Analysés depuis Tel-Aviv, ces chiffres peu flatteurs du commerce bilatéral sont avant tout l’expression d’un paradoxe : alors que l’économie israélienne a beaucoup à offrir, les entreprises françaises peinent à saisir les opportunités sur ce marché à fort potentiel. « Si la relation économique entre les deux pays n’affiche pas un niveau satisfaisant, cela résulte avant tout de freins culturels qui se situent plutôt du côté français », estime Frédéric Szabo, qui dirige le bureau Ubifrance ouvert en septembre dernier en Israël, et travaille depuis vingt ans au service de l’export français. Pour des raisons historiques, pas assez de PME françaises sont parvenues à prendre le train de la mondialisation. Même si l’agence Ubifrance s’est efforcée d’inverser la tendance en recrutant 22 600 nouveaux exportateurs français ces trois dernières années ».

Et pourtant, l’État hébreu ne manque pas d’atouts. Le responsable du bureau Ubifrance de Tel-Aviv confie être très impressionné par « le dynamisme local en matière d’entrepreneuriat » ; par le modèle d’innovation israélien dont la France pourrait s’inspirer « même s’il n’est pas totalement exportable, précise Frédéric Szabo, dans la mesure où il s’appuie sur des technologies développées au sein de l’armée » ; par le niveau d’éducation d’un pays où la part d’ingénieurs s’élève à 35 % (de la population active), contre 15 % dans les autres pays de l’OCDE ; enfin, l’âpreté dans les affaires est un accélérateur. « En Israël, on va droit au but, il y a une culture de prise de risque, et l’on se donne le droit à l’erreur », souligne-t-il encore. Pour autant, trop peu de chefs d’entreprises français hésitent à se rendre dans l’État hébreu, en raison de leur perception du risque sécuritaire. Quand ils ne sont pas freinés par l’étroitesse du marché. Or si le marché israélien n’est pas un marché à « volumes » importants, il présente d’autres avantages.

Un tremplin vers les BRIC

Non seulement le pays s’est imposé « comme une technopole de référence mondiale dans l’informatique, les télécoms ou encore biotech », souligne-t-on chez Ubifrance. Mais il offre aussi un tremplin vers les BRIC (Brésil, Russie, Inde Chine…), avec lesquels Israël est en mesure d’exporter en co-branding. Enfin, comme le montre le projet Better Place, « la plus belle vitrine de la collaboration franco-israélienne », l’État hébreu fonctionne comme un marché test. « Allez donc trouver dans un rayon de 4 000 kilomètres autour de la France, un laboratoire d’innovation comme Israël, qui donne la possibilité de créer des pilotes à l’échelle réelle ! » fait valoir Frédéric Szabo. Mais voilà, à quelques exceptions près, à l’image de Veolia, Alcatel ou Orange (lire encadré), le marché israélien n’est pas tout à fait rentré dans le radar des grands groupes français comme des PME.

L’e-government en développement

Sur le plan sectoriel, Ubifrance tend à privilégier les transports, Israël ayant des années de retard à rattraper dans les infrastructures. Après le projet du tramway de Jérusalem, dans lequel Alstom était partenaire, le pays met en place un autre chantier d’une grande complexité : le métro de la région de Tel-Aviv, qui pourrait intéresser des sociétés françaises d’ingénierie. Autre secteur à fortes synergies, le « e-goverment », une expertise dans laquelle s’illustre Gemalto, qui vient de remporter l’appel d’offres israélien pour les passeports biométriques. Sans oublier les délégations organisées cette année dans l’agro-alimentaire, les énergies renouvelables ou les biotech… Enfin, de nouveaux modes de partenariats sont encouragés. « Je crois beaucoup à l’outsourcing des services export et/ou marketing des entreprises françaises en Israël, un pays d’immigration qui a l’avantage de proposer sous un même toit une très grande variété de collaborateurs polyglottes multiculturels, conclut Frédéric Szabo. Reste que pour franchir ce pas, il faut du culot et d’audace. Nous devons aider nos chefs d’entreprises à développer le goût des autres et à se nourrir de la différence ! »

Alstom va incuber des « clean-tech » israéliennes

L’annonce est tombée le 7 mars, au lendemain de la conférence mondiale d’Eilat-Eilot sur les énergies renouvelables. Alstom va créer avec les société israéliennes Rotem Industries Ltd. et Gefen Biomed Investments, une structure commune visant à financer et soutenir le développement de jeunes sociétés innovantes locales. Sa cible: des spécialistes des énergies renouvelables et alternatives et des technologies permettant d’économiser de l’énergie. « Alstom a choisi d’initier ce projet en Israël en raison de la filière technologique en matière d’énergies renouvelables et alternatives, qui figure parmi les plus avancées au monde », explique le groupe. La société commune, baptisée Horizon, sera détenue à 50 % par Alstom, à 30 % par Gefen et à 20 % par Rotem Industries, et sera implantée à Dimona, dans le sud du pays. Horizon, qui démarrera ses activités dès le mois d’avril 2011, prévoit de financer une dizaine de projets d’incubation en trois ans.

Ils sont présents en israël : l’appel du high-tech

Si la France ne possède qu’une cinquantaine d’implantations industrielles et commerciales en Israël, force est de constater que la collaboration franco-israélienne s’intensifie dans les secteurs du high-tech et des télécoms. Le groupe Alcatel a ouvert la voie en 2006 en s’offrant Native Networks, un fournisseur israélien de solutions optiques de transport Ethernet. De son côté, l’intégrateur Steria a ouvert dès 2005 un bureau de veille technologique en Israël, afin de proposer des solutions innovantes à ses clients européens. Le groupe France Télécom Orange affiche clairement son intérêt pour la sillicon valley israélienne. Sa filiale Viaccess a racheté voilà deux ans, Orca Interactive, un spécialiste du middleware IPTV et des applications pour les opérateurs de réseau à large bande. Le groupe français a inauguré en octobre 2009 un centre de développement près de Tel-Aviv, après avoir signé quelques mois plus tôt un accord de coopération avec l’Université Ben Gourion. Preuve qu’Israël fait partie intégrante de sa politique d’innovation.

Enfin, le onze avril dernier, l’homme d’affaires Patrick Drahi, président d’Altice, co-actionnaire de Numericable-Noos, a fait partie des deux gagnants (aux côtés de Xphone) de l’appel d’offres israélien pour l’attribution de deux nouvelles licences de téléphonie mobile. Une opération d’un montant total de 280 millions d’euros, sur un marché local dynamique (fort de trois autres opérateurs mobiles) estimé à près de quatre milliards d’euros. Patrick Drahi avait déjà investi 250 millions d’euros pour contrôler le premier câblo-opérateur israélien Hot, avant de racheter à Motorola l’opérateur telecom Mirs, moyennant une mise de 125 millions d’euros. L’actionnaire français de Mirs déboursera désormais 142 millions d’euros pour jouer dans la cour des grands desopérateurs mobiles. Dans le cadre de cet appel d’offres, Patrick Drahi était en concurrence avec l’ex-Dg de Free, Michael Boukobza, installé depuis quatre ans en Israël, appuyé par son ex-patron, Xavier Niel (Iliad Free).

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