Alors que les discussions sur les modifications du code de travail et de ses procédures battent leur plein à l’assemblée nationale, Muriel Pénicaud, la ministre du Travail, a confirmé devant les députés qu’elle s’apprête à augmenter les indemnités légales suite à un licenciement. Et répond ainsi favorablement à une requête de certains syndicats… pour mieux les amadouer sur d’autres changements -plus délicats- à venir ?
Mesure revendiquée de longue date par la CFDT et FO, Muriel Pénicaud a tâché de convaincre l’ensemble des députés d’augmenter les indemnités légales de licenciement en septembre par mesure réglementaire, sans pour autant avancer l’ampleur de cette hausse. Elle a demandé de fait le retrait d’un amendement du député Aurélien Taché (REM) qui allant aussi dans ce sens.
«Je propose (…) à l’ensemble des députés de soutenir la proposition du gouvernement d’augmenter les indemnités légales pour la totalité des salariés qui perdent leur emploi» a-t-elle déclaré dans l’hémicycle.
A l’heure actuelle, les indemnités de licenciement ne peuvent être inférieures à 1/5 de mois de salaire par année d’ancienneté, auquel s’ajoutent 2/15 de mois par année au-delà de 10 ans de contrat.
Une annonce saluée par FO et la CFDT…
Une attitude saluée par Michel Beaugas de FO qui y voit «une bonne chose» et qui ne manque pas de rappeler que la France reste en-dessous de la moyenne européenne sur cette question des indemnités de licenciement. FO n’est d’ailleurs pas étranger à cette proposition du ministre puisque le syndicat a rencontré Muriel Pénicaud deux jours avant (mardi 11 juillet) pour parler de ce sujet, et si pour l’instant il n’y a aucune officialisation de la valeur de la hausse, le syndicat espère un doublement des indemnités.
Une façon de compenser (un peu) une autre mesure, bien plus décriée : le plafonnement des indemnités prud’homales en situation de licenciement abusif et qui va, à priori, être particulièrement vu à la baisse.
Du côté de la CFDT, par la voix de Véronique Descacq, on fait part de sa satisfaction mais on attend aussi de voir le niveau d’augmentation. Car les requêtes de la CFDT sont claires : «passer les indemnités à ½ mois de salaire par année d’ancienneté» (au lieu des 1/5 aujourd’hui), soit plus qu’un doublement. De plus la CFDT demande que ces indemnités soient reversées «même avant un an d’ancienneté», ce qui nécessiterait «un amendement au projet de loi d’habilitation» comme le souligne Véronique Descacq.
…Mais boudée par la CGT
La CGT en revanche n’a pas salué cette mesure qui voit en elle une diversion sur les propositions les plus lourdes à venir. Sophie Binet argue d’ailleurs que «même si on double ces montants, ce n’est pas du tout « désincitatif » au licenciement, tellement le montant est faible».
Néanmoins il est certain que cette déclaration de la ministre du Travail est une façon pour le gouvernement Philippe de mettre un peu d’eau dans son vin, tandis qu’il s’attend à une lever de boucliers dans les prochaines semaines, menée dès à présent par les députés Insoumis du camp Mélenchon. Une façon aussi de faire oublier les récentes directions gouvernementales prises à l’égard des fonctionnaires (gel du point d’indice, rétablissement du jour de carence, notamment) et la simplification du compte pénibilité.
La Confédération des PME, pas très emballée de son côté
La CPME (Confédération des PME) s’est montrée, de son côté, peu enthousiaste à l’égard de cette hausse des indemnités de licenciement, comme cela était à prévoir. Inquiète, l’organisation patronale apprécierait volontiers que le gouvernement soit le moins «flou» possible quant à la latitude de cette augmentation, et que la ministre du Travail précise, au passage, le plafonnement des indemnités prud’homales.
Un long travail de conciliation en marche
Muriel Pénicaud a justifié cette décision par la volonté qu’il y ait plus de conciliation entre le gouvernement et les acteurs syndicaux et patronaux.
«Cela veut dire d’abord des procédures de conciliation, ça veut dire ensuite les incitations fiscales et sociales que vous avez votées tout à l’heure, et la question des indemnités légales se pose» a-t-elle avancé, et de rappeler par ses mots que «la France est l’un des pays qui a un niveau d’indemnités légales, et souvent conventionnelles par conséquence, qui est plus bas que la moyenne».
Conjointement à l’examen du projet de loi d’habilitation, le cabinet ministériel continue donc ses concertations avec les partenaires sociaux. Le processus doit prendre fin autour du 21 septembre, pour la publication des ordonnances. La rentrée sera-t-elle aussi « chaude » que les vacances d’été ?