Le Président américain ne faillit pas à sa réputation d’homme allant à contre-courant des idées progressistes et humanistes, en déclarant jeudi 1er Juin vouloir faire sortir son pays (deuxième plus important pollueur au monde) de l’Accord de Paris sur le climat, pourtant ratifié par son prédécesseur. Sans doute se sent-il plus « puissant » à l’idée de se mettre le reste de ses partenaires internationaux à dos, en marchant seul et contre tous dans bon nombre de dossiers internationaux. Mais le peuple américain, bien que l’ayant élu à la magistrature suprême, ne le suit pas dans sa totalité fort heureusement, une façon aussi de rappeler que si Donald Trump est bien devenu Président des Etats-Unis, par l’ambiguïté du système électoral nord-américain, il cumulait à l’époque moins de voix citoyennes effectives que sa concurrente. Il est donc rassurant de savoir que beaucoup de dirigeants d’entreprises et de grands groupes outre-atlantique ont une conscience et que malgré le demi-tour catastrophique de leur chef d’état, ils poursuivront de leurs côtés leurs engagements pour une économie verte.
Ainsi deux fleurons de l’industrie américaine et pas des moindres, Coca-Cola et General Electric, ont par exemple -et ce bien avant que Trump réitère sa volonté de quitter l’Accord de Paris- assuré qu’ils réduiraient leur empreinte carbone de 25% pour Coca-Cola, et 20% pour G.E. d’ici 2020. Jeff Immelt, le patron de G.E. n’a d’ailleurs pas manqué de rappeler que pour lui et ses partenaires « le changement climatique est réel et la science fait foi ». L’entreprise US « number one » Apple, rappelle qu’aux Etats-Unis elle utilise déjà 100% d’énergies renouvelables, et est particulièrement impliquée dans la recherche et développement des énergies vertes, notamment via sa filiale Apple Energy LLC. Même Monsanto, bête noire des écologistes, se dit prêt à « aider les agriculteurs du monde entier afin de s’adapter au changement climatique et en atténuer les effets »… d’ici à ce que certains y voit une excuse déguisée pour déployer sa main mise sur les terres agricoles…
Même les représentants des énergies fossiles tiennent à leur image de marque
Chez les géants du pétrole et autres énergies fossiles, ceux contre qui, d’une certaine façon, l’Accord de Paris se bat -en tout cas vise à limiter le développement-, il y a aussi une prise de conscience et une volonté d’honorer l’Accord de Paris en faisant tout ce qui est possible pour limiter la hausse du thermomètre de notre planète en deçà des +2°.
Ainsi Chevron assure via sa porte-parole Melissa Ritchie « continuer de soutenir l’Accord de Paris parce qu’il constitue un premier pas vers un cadre international ». Et son concurrent direct ExxonMobil n’avait pas manqué de demander au Président Trump de rester dans cet Accord de Paris afin de faire face aux risques et changements climatiques.
Alors, simple effet de façade, beaux discours pour redorer des images de marque particulièrement entachées par le fond de commerce même de ces enseignes (sans parler des incidents écologiques passés, combien encore d’Exxon Valdez à craindre), ou véritable reconversion pour des sociétés qui acceptent de prendre leur part de responsabilité, au risque d’accepter à (moyen) terme une progressive agonie de leur industrie fossile ?
Faire fit de ses responsabilités écologiques est contre-productif
Il y a encore peu de temps les lobbies industriels américains faisaient capoter avec brio les différentes tentatives de négociations internationales pour le climat, qu’il s’agisse du protocole de Kyoto ou plus récemment encore le sommet de Copenhague, en 2009, clôturé sur un échec.
Alors pourquoi le son de cloche a-t-il à ce point changé ? Point de révélation, ni de sagesse écolo, mais un changement économique qui a réussi globalement à prendre en compte (et là on peut, en tant qu’européens, être particulièrement fiers d’en avoir été les instigateurs) la nécessité de l’énergie verte et du renouvelable. La plupart des investisseurs internationaux essaient au maximum de se détacher (dans la mesure du possible) des énergies fossiles et les entreprises, régulièrement aidées par les Etats pour toute initiative écologique, veulent minimiser leur empreinte carbone.
Après la Révolution industrielle du XIXe siècle qui a vu la généralisation à outrance des énergies fossiles et minières, le XXIe siècle connaîtra à son tour une nouvelle Révolution industrielle alimentée par de nouveaux « carburants ».
Mais un autre facteur a aussi pesé au cours de ces dernières années : la baisse régulière des cours du prix du baril de pétrole qui n’incite pas à l’investissement dans ce secteur.
Enfin, tous les acteurs économiques souhaitent baisser leurs coups d’énergie, et les sources naturelles comme le solaire ou l’éolien permettent, une fois les outils et installations mis en place, de faire de véritables bénéfices. Des technologies vertes qui ne cessent d’évoluer et s’améliorer, dont les coûts baissent aussi, notamment via les incitations publiques, rendant ce secteur ultra dynamique.
Depuis son début de mandat, Donald Trump a adopté une attitude qui sur chaque dossier l’isole un peu plus de ses alliés historiques et met à mal ce que son prédécesseur avait élaboré. Sans doute la seule façon pour lui de s’affirmer et de se sentir fort au reste du monde, mais à continuer à ce jeu là, c’est l’ensemble de sa population qu’il va finir par se mettre contre lui et les institutions internationales. Une occasion rêvée pour l’Europe de s’imposer et de supplanter l’influence géopolitique et économique américaine, de devenir leader mondial des nouvelles technologies vertes, et pourquoi pas de le faire conjointement avec les grands groupes américains, au détriment de celui qui ne semble pas vouloir de « conjoints politiques » avec lui.