Une incertitude des deux côtés de l’Atlantique
Les deux « révolutions électorales » qui ont chamboulé les pronostics et espérances d’une grande majorité d’acteurs économiques en place en Occident, sont sans conteste le choix du Brexit au Royaume-Uni et l’élection de Donald Trump aux Etats-Unis, porte-voix du protectionnisme assumé. Ces deux événements ont mis en avant la protestation populaire contre ce que jusqu’à lors nous appelions la « Mondialisation heureuse ». A ces deux événements, d’autres du même acabit pourraient se produire en 2017 (résultat des élections françaises en avril 2017 par exemple) qui confirmeraient un peu plus cette tendance. Quoiqu’il en soit les conséquences sur les moyens et longs termes du Brexit et de la Présidence de Donald Trump ne sont pour l’instant pas encore prédictibles, mais ont de quoi donner des sueurs froides à certains.
Ainsi le Royaume-Uni risque de connaître une succession de petites crises politiques -doublée d’un ralentissement économique- lors de ses séances de négociations avec Bruxelles pour tirer avantages de sa sortie de l’Union européenne sur fond de conflits d’intérêt avec les Ecossais et les Gallois qui eux souhaitent conserver leur maintien au sein du marché unique européen.
Quant aux ambitions de Trump pour protéger les industries lourdes et naissantes américaines, celles-ci se concrétiseront nécessairement par un protectionnisme assumé et un raidissement commercial avec la Chine, grand responsable selon Trump de l’appauvrissement chronique de toute une partie de la population américaine, notamment chez les WASP, foyer électoral majoritaire du futur occupant du bureau ovale. Bref, le libre échange tel qu’il régnait jusqu’à présent, faisant la part belle aux pays émergents, risque de connaître quelques crises lui aussi, notamment entre les deux géants exportateurs historiques.
La Chine nous réservera-t-elle quelques surprises ?
Le géant chinois est justement au centre de toutes les attentes. Après une décennie de triomphe qui a permis à l’empire du Milieu de s’ériger à la deuxième place de l’économie mondiale, la Chine fait logiquement face à des changements politiques, économiques, diplomatiques et militaires. Une économie chinoise maintenue par de conséquentes subventions publiques et une monnaie nationale (le yuan) dont la parité reste à flot grâce à une utilisation prépondérante des réserves de change qui sont passées de 4000 milliards de dollars mi-2015 à 3000 milliards de dollars fin 2016. Les prévisions des politiques intérieurs et extérieurs chinoises dans la perspective du 19e Congrès du Parti Communiste Chinois qui se tiendra dans la seconde moitié de l’année, restent incertaines si l’on prend en compte les tensions importantes en mer de Chine et les prémisses de l’affrontement commercial avec Washington. Xi Jinping qui depuis quelques temps concentre le pouvoir absolu tel un Mao réincarné devrait consolider sa stature.
Un retour des énergies fossiles
Alors que 2015 et 2016 ont été des années difficiles pour les croissances des « Etats pétrole » avec une chute prolongée du prix du baril en 2015, un nouveau cycle des matières premières devrait avoir lieu en 2017 grâce aux accords de l’Opep sur la stabilisation de la production pétrolifère signés en 2016 et l’élection de Donald Trump, favorable à un nouveau cycle de croissance des énergies fossiles.
Les cours du pétrole qui avaient augmenté en 2016 devraient donc se tenir de façon favorable en 2017 permettant ainsi aux pays producteurs de renouer avec une croissance plus élevée. Est-ce que cette tendance sera préjudiciable aux ambitions écologiques portées par la COP 21 de Paris ?
Un système bancaire encore bien fragile
L’empreinte laissée par la crise de 2008 sur les banques reste profonde et les déséquilibres du système financier restent intacts. Les endettements publics comme privés se sont accrus ces dernières années. Les banques systémiques gardent une épée de Damoclès au-dessus de leur tête, nombreux sont ceux qui prédisent une prochaine grande crise financière à l’échelle mondiale et trois choses devraient continuer de fragiliser le système bancaire : la transformation digitale qui rend caduque le réseau des banques de détail, la séparation entre banque d’affaires et de détail et des taux bas qui prennent sur les marges.
La digitalisation nous échappera-t-elle ?
La transformation digitale est lancée depuis déjà un moment, mais sa croissance est exponentiellement fulgurante année après année, au point peut-être de devenir, sinon totalement incontrôlable, difficile à discerner dans ses conséquences sur le long terme, d’un point de vu global. Faite pour faciliter les choses et améliorer les rendements, elle est créatrice d’emplois tout comme elle en détruit et chamboule des sociétés qui se reposent sur certains schémas sociétaux acquis, l’ «ubérisation» de la société ne se fait pas toujours dans la douceur. Pas une activité économique n’est épargnée par la digitalisation et malgré les nombreuses études développées, avons nous réellement une vision clarifiée des prochaines années totalement digitalisées ?
Bien entendu il ne s’agit pas de s’effrayer d’une mutation économique et sociétale aussi importante que l’a été la Révolution Industrielle en son temps, mais toute mutation n’entraine-t-elle pas avec elle son lot de « perdants oubliés » ?
2017 réserve de nombreuses surprises par les directions économiques et politiques qui vont apparaître au fil des mois et laisse entrevoir de lourds chamboulements sur l’échiquier multipolaire du monde commercial. Mais après une redondance des échecs flamboyants de l’ensemble des sociétés de sondage et d’analyse des tendances sur les événements de 2016, peut-être est-il plus sage de ne pas tirer de plans sur la comète.
commerce international, CCI News.com.