La dernière étude « Sigma » (publiée récemment par le groupe Swiss Re), qui dresse un bilan complet des marchés mondiaux de l’assurance, confirme la bonne santé du marché de l’assurance-vie. « En 2006, l’assurance-vie a progressé de 7,7 %, son meilleur taux de croissance depuis 2000, à un rythme plus rapide que l’activité économique globale dans la plupart des pays, à l’exception du Japon », indique l’étude. Cela tient avant tout à la bonne tenue des marchés boursiers qui a favorisé les produits en unités de comptes, notamment en Europe occidentale, ainsi qu’à certains changements réglementaires et incitations fiscales. C’est au Royaume-Uni que l’on a observé la plus forte progression des primes (+30 %), car des changements sont intervenus dans la réglementation des retraites autorisant une contribution accrue à ces fonds. « En Belgique, en revanche, les primes vie ont chuté de 21 % suite à l’entrée en vigueur d’une nouvelle taxe de 1,1 % sur les polices individuelles », comparent les auteurs. Aux États-Unis, l’assurance-vie a repris de la vigueur, ce qui s’explique par le succès des produits visant la constitution d’un capital (en particulier les rentes variables). Même schéma au Canada, pays où la bonne forme des marchés a bénéficié à la commercialisation de produits individuels basés sur des actions.
Du côté des marchés émergents, les chiffres sont également à la hausse. Le même groupe a publié en début d’année une autre étude « Sigma » intitulée L’Assurance dans les marchés émergents : solide évolution et opportunité pour l’assurance agricole. Elle révèle que « les primes d’assurance-vie (…) ont totalisé 2 560 milliards de dollars en 2005 (+ 7,5 %), l’essentiel de la croissance étant imputable à l’Asie (+ 10,5 %) ». Swiss Re attribue ces résultats à « une hausse rapide des revenus d’une population relativement jeune, portée sur l’épargne et impatiente de prendre part à l’essor des marchés d’actions de la région. » Quant aux PECO (Pays d’Europe centrale et orientale), ils présenteraient un gros potentiel en matière de prévoyance retraite. Allianz Global Investors (AGI) vient de consacrer à cette question une nouvelle étude portant sur onze pays – Bulgarie, Croatie, Estonie, Hongrie, Lettonie, Lituanie, Pologne, République tchèque, Roumanie, Slovaquie et Slovénie – qui vivent les mêmes problèmes de dénatalité que l’Europe occidentale. Bilan des experts : d’ici à 2050, leur population va diminuer de 15 % pendant que le quotient de personnes de plus de 65 ans passera de 20 % actuellement à 50 %. Huit d’entre euxont introduit des systèmes de retraites par capitalisation obligatoire pour faire face à cette évolution négative. Selon l’AGI, « le marché des retraites dans les PECO connaîtra jusqu’en 2015 une croissance annuelle de 19 %, ce qui en fera passer le volume de 51 milliards d’euros à 245. » Pour l’heure, la Pologne constitue le marché le plus porteur (60 % du total).
Pour 2007, « Sigma », comme d’autres comptes-rendus de l’état du marché, se montre optimiste : « L’augmentation du capital sous risque permettra à terme aux assureurs-vie de verser de meilleures bonifications aux preneurs d’assurance, ce qui devrait entraîner unecroissance future. » Le marché de l’Europe occidentale, qui connaît une période de mutation réglementaire, devrait continuer de ce fait à bénéficier d’une croissance de l’assurance-vie, et à un niveau élevé. « Les traitements fiscaux privilégiés accordés aux polices d’assurance-vie traditionnelles ont été réduits dans certains pays – comme l’Allemagne et la Belgique –, tandis que des avantages fiscaux sont octroyés à de nouveaux produits de prévoyance vieillesse privée et professionnelle – Allemagne, France, Espagne, Portugal », rappelle « Sigma ». Seul le Royaume-Uni ne devrait pas bénéficier de la croissance après l’essor connu en 2006. Ces constats et perspectives poussent tous les acteurs de la protection sociale à innover et à mieux conseiller leurs clients. Transparence, performance et compétitivité sont aujourd’hui les maîtres mots du secteur. Ce qui ne déplaît pas forcément. « Les projets en cours permettent aux acteurs en place de se remettre en question. Le projet Solvabilité II, notamment, est structurant pour nos entreprises et sécurisant pour les sociétaires. Tout cela est très positif », estime par exemple Gilles Ulrich, directeur général adjoint du groupe Le Conservateur.
Le projet Solvabilité II
L’assurance européenne vit une profonde mutation. La Commission européenne a adopté, le 10 juillet, le projet de directive-cadre Solvabilité II qui arrête le nouveau système prudentiel des assurances et devrait ainsi radicalement modifier la gestion des risques pour les assureurs. La réforme concerne deux principes essentiels : le calcul de la marge de solvabilité des compagnies et le mode de supervision des groupes multinationaux. Elle vise à mieux intégrer le marché européen de l’assurance afin de permettre aux compagnies de tirer les avantages du marché unique et d’abaisser les coûts de couverture. Il s’agit aussi d’améliorer la compétitivité des sociétés d’assurance par rapport à leurs concurrentes américaines et asiatiques. La réforme s’articule autour de trois piliers : les mesures quantitatives en matière de niveau de provisionnement et de fonds propres des assureurs, les activités de contrôle et les exigences en matière d’information prudentielle et de publication.
Prochaines étapes de Solvabilité II :
– Septembre 2007: début des débats en commission ECON (Commission économique et monétaire) au Parlement européen.
– Octobre 2007 : lancement d’une consultation sur la définition des formules de probabilité standard pour la couverture des risques couverts par les assurances.
– Novembre 2007 : publication de l’analyse des résultats de la troisième étude d’impact (QIS3).
– Printemps 2008 : avis final du CEIOPS (Committee of European Insurance and Occupational Pensions Supervisors) sur les formules standards. Débats en plénière au Parlement européen.
– 2009 : entrée en vigueur de la directive européenne Solvabilité II. Transposition de la directive dans les différents droits nationaux.