L’OCDE épingle la Suisse sur sa transparence fiscale

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Le Forum mondial sur la transparence fiscale qui s’est tenu le mercredi 1er juin aux Bermudes a rendu son verdict critique sur neuf pays, dont la Suisse.

 

L’Organisation pour la coopération et le développement économique (OCDE) semble se lasser des promesses non tenues de Berne en matière de coopération fiscale. Le Forum mondial pour la transparence et l’échange d’informations fiscales, qui regroupe 101 pays sous l’égide de l’OCDE, a rendu public, mercredi 1er juin, aux Bermudes, son verdict sur 9 pays, dont la France, les États-Unis, la Suisse et Singapour, deux places financières réputées opaques.

 

Comme attendu, l’OCDE ne ménage pas la Confédération helvétique. Plusieurs « manquements » de la législation suisse au regard des nouveaux accords internationaux en matière fiscale sont pointés du doigt. En mars 2009, afin de sortir de la « liste grise » où elle était tombée à l’époque, la Suisse s’était engagée à ne plus opposer son secret bancaire lors des enquêtes pour évasion fiscale. La Confédération a revu la plupart de ses accords fiscaux bilatéraux – 29 nouveaux accords ont été signés – afin d’y inclure les dernières normes de transparence fiscale exigées par l’OCDE. Mais le Forum regrette que la législation helvète, en cours d’approbation par le Parlement, reste trop restrictive, empêchant de facto la transmission d’informations sur les évadés fiscaux. En effet, les nouveaux textes suisses stipulent que l’État requérant doit disposer du nom et de l’adresse du fraudeur présumé afin d’éviter une « pêche aveugle » aux informations.

 

Conséquence, « seule une minorité » des nouveaux accords signés sont jugés conformes aux normes OCDE. Informée ces derniers mois de l’agacement de l’OCDE à ce sujet, la Suisse tente de rectifier le tir. Ainsi, le ministère helvétique des Finances a devancé les conclusions du Forum en annonçant le 13 février dernier un nouvel assouplissement, avec des moyens d’identification plus larges. « Étant donné que cette décision n’a pas encore été adoptée par le Parlement, elle n’a pas été acceptée par le Forum mondial comme étant une base légale en vigueur », a d’ailleurs souligné le gouvernement helvétique après avoir pris connaissance des conclusions du Forum. Alors que la Suisse affiche sa confiance, l’OCDE a prévenu que la Confédération ne pourra passer à la phase suivante de l’évaluation, prévue au cours de la seconde moitié de 2012, qu’à condition d’avoir un « nombre significatif » d’accords « conformes aux normes », ainsi qu’une interprétation appropriée de ces traités.

 

Cette pression de l’OCDE est très mal acceptée par la place financière suisse, qui craint de voir disparaître totalement le secret bancaire et redoute de nouveaux retraits de fonds au profit des places financières asiatiques, jugées moins scrupuleuses. L’opposition des banquiers suisses est d’autant plus forte que l’OCDE est plus clément vis-à-vis de Singapour. Les lacunes se limitent à l’autorité en charge des enquêtes pour évasion fiscale. Selon le Forum, cette institution ne serait pas dotée de pouvoirs d’investigation suffisants pour obtenir des informations des banques ou des sociétés off-shore. Or, c’est vers Singapour que la plupart des fonds cachés en Suisse seraient réfugiés depuis deux ans.

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