L’Espagne sous la pression des expropriations en Amérique Latine

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Le président bolivien Evo Morales (D.R.)
Après l’Argentine, au tour de la Bolivie de renationaliser une structure en partie détenue par un investisseur espagnol. Mais Madrid réagit différemment cette fois.

 

Deux expropriations en Amérique Latine en une quinzaine de jours, cela fait beaucoup pour le gouvernement espagnol. Après celle de YPF, la filiale de Repsol en Argentine, voici le tour de la filiale de Red Eléctrica de España (REE) en Bolivie. Evo Morales a justifié la nationalisation par les « faibles investissements » de cette filiale depuis sa privatisation en 1996, chiffrés à “5 millions de dollars (3,7 millions d’euros) par an ». REE est détenue à 20% par l’État espagnol, qui en est le premier actionnaire. Mais Madrid a réagi très différemment à ces deux décisions. Si le gouvernement espagnol s’est prononcé énergiquement contre celle de l’Argentine, bloquant les importations de biodiesel pour une valeur de 750 millions d’euros annuels, il a affiché une volonté de dialogue avec les autorités boliviennes.

« J’aurais aimé que l’Argentine agisse avec YPF comme le gouvernement de Evo Morales a annoncé qu’il le ferait”, a expliqué le ministre des Affaires étrangères, José Manuel García-Margallo. La Bolivie assure qu’elle réalisera une évaluation de REE, « le type de formule adéquate pour résoudre un tel contentieux », a ajouté le ministre. Dans le cas de Repsol, un ministre argentin a estimé que la participation de Repsol dans YPF ne valait rien, laissant craindre au pétrolier espagnol une indemnisation peu satisfaisante. José Manuel García-Margallo s’est même montré très compréhensif envers la Bolivie, expliquant que les modèles qui « optent pour la souveraineté énergétique sont parfaitement légitimes même s’il ne partage pas cette option ».

Mais les patrons commencent à se rebiffer, peu satisfaits de cette réaction à demi-mot de Madrid. Le vice-président de la Confédération espagnole des organisations patronales (CEOE), Arturo Fernández Álvarez, a réclamé au gouvernement espagnol une « mise en garde » pour ces deux pays. « On se moque de nous. D’abord l’Argentine, maintenant la Bolivie, on cherche des histoires à celui qui est faible… Nous devons dire que cela suffit, on se moque de nous! », a-t-il poursuivi. Ce dirigeant craint un effet domino en Amérique Latine. L’Espagne, sous le coup d’une grave crise économique et de la pression des investisseurs, peine à faire entendre sa voix.

Si Madrid a bien tenté de mobiliser Washington et l’Union européenne, elle est seulement parvenue à obtenir des condamnations verbales envers l’Argentine et quelques gestes symboliques, mais rien d’économiquement gênant pour l’Argentine. C’est bien là que le bât blesse. L’Espagne, en difficulté, n’est pas en mesure de réagir. Le pays se sent d’autant moins à l’aise qu’il n’a rien à gagner à un affrontement direct; ses entreprises ne peuvent se permettre de perdre ce marché. Avec la crise, les exportations restent la planche de salut, notamment en Amérique Latine, où l’Espagne est le deuxième investisseur.

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