L’économie des cheveux gris ne se fait pas de cheveux blancs

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Avec 900 millions de personnes âgées de plus de 60 ans dans le monde dont 15 millions en France, les seniors sont déjà la nouvelle cible des industriels. Services personnalisés, technologies pour l’autonomie domotique, objets connectés pourraient devenir le marché exponentiel de demain.

 

« Le vieillissement de la population ne constitue pas seulement une donnée essentielle pour l’avenir. Il ouvre également des perspectives novatrices pour entreprendre aujourd’hui. » Bernard Devy, président de l’Organisme Commun des Institutions de Rente et de Prévoyance qui réuni plus de 30 organismes de prévoyance ne fait qu’enfoncer des portes ouvertes. Avec 15 millions de personnes âgées de plus de 60 ans en France, un chiffre estimé à 20 millions pour 2030, en avril 2013, Michèle Delaunay, médecin et ancienne ministre chargée des Personnes âgées et de l’autonomie, en partenariat avec Bercy a lancé la Silver Economie. Un regroupement avec un terme anglais signifiant « argenté » qui désigne l’économie des cheveux gris, au service des âgés. Son ambition : donner aux entreprises les moyens d’imaginer, de développer et de distribuer des produits et des services qui serviront l’autonomie des âgés de demain, en France et dans le monde.

 

 

La Silver Economie, sa Silver Valley, son syndicat, ses entreprises, ses journalistes

 

Les fondations déjà là, l’engouement du concept a été immédiat. Aux côtés d’un Silver syndicat, l’Asipag et de Silver entreprises dans tout l’hexagone, en 2013, une Silver Valley est née du réseau associatif Soliage, étalant une cinquantaine d’entreprises dans un incubateur à Ivry-sur-Seine. Cet écosystème s’est donné pour mission d’accélérer le développement d’activités économiques répondant aux besoins et aux usages des seniors, pour générer de la croissance et l’emploi en Ile-de-France. Aujourd’hui, au total 150 structures représentant 1000 emplois en font partie. «Tous les secteurs qui travaillent sur le grand âge sont regroupés : voitures, numérique, habillement… On distingue trois collèges dans notre entité : les entreprises, la recherche et le développement et les utilisateurs, présente Guillaume Lebreton, responsable communication de ce microcosme. Nous servons à subventionner certains projets, en passant par exemple par la Région Ile-de-France ou AG2R Reunica. Ainsi la société Eye Brain a pu développer, en 2010, une sorte de scanner qui détecte les maladies neurodégénératives, en fonction du mouvement des yeux a vu le jour et s’industrialise aujourd’hui pour se vendre dans les cliniques privées contre des millions d’euros.»

Les produits prolifèrent, comme la Mamie Box, le coffret de téléassistance téléphonique conçu par Assystel, entreprise française qui allie la fabrication de matériel à une prestation de service. « Grâce à un bouton en forme de collier ou bracelet, nos 20000 abonnés, à 99% senior sont reliés à des plateformes téléphoniques. Ils appellent, on les relie à un intervenant, au Samu, à la gendarmerie, à un voisin, selon le cas. Le profil type, c’est la femme de 81 ans, qui a fait une chute déjà ou perdu son mari, confie Alexis Roche, le patron de l’entreprise qui enregistre 3,5 millions d’euros de chiffre d’affaires par an.

 

 

Un réseau mondial en pleine santé 

 

La Silver Valley a ainsi permis à AssysTel de vendre les fauteuils de confort, barres douches de la société Herdegen et de rencontrer des collaborateurs comme Vivago, fabricant de montres d’actimétrie. Un réseau, déjà dupliqué au Quebec avec l’aide d’UbiFrance qui ne cesse de s’agrandir et devrait atteindre les 300 structures d’ici trois ans s’il suit les espoirs de ses dirigeants. « Avec un trimestre de vie gagné en France chaque année, les statistiques de l’Insee sont avec nous », précise Alexis Roche. Et, avec 900 millions de personnes âgées de plus de 60 ans à travers le monde, ce nouveau business florissant ne devrait pas connaître de frontières et devrait vivre comme un coq en pâte.