L’école d’ingénieurs de Saint-Étienne joue la carte de l’international

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Titulaire d’un doctorat en mathématiques après des études supérieures à Nantes et à Lyon, le professeur Bernard Laget, 61 ans, est directeur de l’ENISE depuis maintenant neuf ans. Il est par ailleurs président du groupe des ENI, les Écoles nationales d’ingénieurs.

 

Commerce International : Dans quelles circonstances a été fondée l’ENISE ?

 

Bernard Laget : « Tout comme les autres ENI (voir encadré), l’ENISE a été fondée en 1961. À l’époque, il fallait à tout prix développer des structures d’enseignement supérieur dans des territoires fortement industrialisés ou à fort potentiel industriel. Cinq écoles nationales d’ingénieurs ont vu le jour cette année-là à Brest, Belfort, Metz, Tarbes et Saint-Étienne. Toutes proposaient des formations post-baccalauréat en quatre ans (aujourd’hui cinq) afin de former des ingénieurs plutôt destinés à l’encadrement dans les PME. Ce positionnement de niche, qui avait ses avantages et ses inconvénients, a évolué au fil du temps ; aujourd’hui, de plus 30 % des anciens sont chefs d’entreprise et tous les autres sont cadres au sein de PME, de multinationales ou dans la fonction publique. »

 

Quels types de formation dispensez-vous ?

 

B. L. : « L’ENISE compte deux filières en formation initiale : génie civil et génie mécanique. Depuis le mois de mars, nous avons aussi une filière de génie civil en apprentissage et l’année prochaine, nous aurons une filière de génie mécanique en apprentissage. Une option lourde en génie sensoriel peut être prise dès la troisième année. Les formations durent cinq ans post-baccalauréat, mais il y a de la mobilité interne et certains étudiants arrivant avec un diplôme de type Bac+2 (diplôme universitaire technologique, classes préparatoires aux grandes écoles, licence 2…) entrent directement en troisième année. Concernant la validation des acquis de l’expérience, VAE, nous en avons défini la procédure avec d’autres écoles de la région (INSA, INPG ou ITECH) il y a deux ans. Cette année, nous allons remettre pour la première fois un diplôme de l’ENISE à une personne ayant bénéficié de la VAE. »

 

Depuis quand l’ENISE est-elle installée sur ce campus ?

 

B. L. : « La première pierre du site a été posée en 1975 et l’ENISE s’y est implantée en 1977. Ce campus est à l’image de l’école : à taille humaine, tout simplement. Nous avons plus de 12 000 m2 de bâtiments répartis sur 5 hectares, une cafétéria, un foyer de 130 places, une résidence étudiante de 80 places gérée par la société Le Toit Forézien. Une seconde est d’ailleurs en projet. »

 

Quels sont vos effectifs estudiantins ?

 

B. L. : « L’ENISE accueille chaque année 750 étudiants, ce qui nous donne des promotions de 140 à 150 élèves. La plupart sont des élèves ingénieurs, mais il y a aussi 30 masters et 25 doctorants en association avec l’École des mines de Saint-Étienne. 48 % des étudiants sont issus de la région Rhône-Alpes et le reste est constitué de Français et d’étrangers, notamment des Marocains, car nous avons un centre d’examens basé à Rabat. Les étudiants n’ont à régler que des frais d’inscription semblables à ceux des universités et peuvent bénéficier de diverses bourses d’études : bourses de l’ambassade de France en Russie, bourses régionales MIRA (Mobilité Internationale Rhône-Alpes) ou bourses de l’école… »

 

Comment fonctionne l’école en général ?

 

B. L. : « L’ENISE compte aussi 110 personnels titulaires (dont la moitié sont des professeurs ou des enseignants-chercheurs) et 20 personnels sous contrat, dont 6 dans la fonction logistique. Le budget consolidé en 2008 a été de 10 millions d’euros environ. Les deux tiers de cette somme proviennent de l’État et le reste se divise entre les entreprises, la Région Rhône-Alpes, l’Union européenne (Fonds européen de développement régional, FEDER) et les ressources propres de l’école. »

 

Quelles sont les différentes formes de partenariat international de l’école ?

 

B. L. : « L’ouverture à l’international de l’ENISE date de ses débuts. Dès 1973, nous avons signé des accords de double diplôme avec les universités de Portsmouth (Royaume-Uni) et Siegen (Allemagne). Aujourd’hui, l’ENISE compte en tout six doubles diplômes puisque sont venues s’ajouter à la liste les universités de Patras (Grèce), Mendoza (Argentine), et l’année prochaine Madrid et Séville (Espagne). Par ailleurs, l’ENISE a signé 48 accords de coopération et de recherche avec d’autres universités étrangères : Moscou, Saint-Pétersbourg, Novossi-birsk (Russie), Brisbane, Perth (Australie), Christchurch (Nouvelle-Zélande), Porto Allegre, Florianopolis (Brésil), Singapour… pour ne citer que des établissements implantés en dehors de l’espace européen. Ces accords permettent de trouver un établissement de tutorat ou encore des stages en entreprise. Nous avons aussi des accords Erasmus, notamment avec
la Pologne. »

 

Justement, quelles places occupent les stages au cours des années d’études ?

 

B. L. : « En cinq années d’études, un élève doit obtenir 300 crédits ECTS (European Credits Transfer System). Sur ces 300 crédits, les stages correspondent à pas moins de 85. En termes de durée, cela représente un an et demi de stages. Ce choix pédagogique – qui a été le nôtre – dès l’origine d’intégrer les stages dans la scolarité, de les rendre obligatoires et de les noter a porté ses fruits : nos formations sont beaucoup plus professionnalisantes et facilitent les départs à l’étranger. »

 

Quelle est la place de la recherche au sein de l’ENISE ?

 

B. L. : « L’école a depuis sa création développée une activité de R&D. Toutefois, le premier enseignant-chercheur a été recruté en 1986 et le premier laboratoire propre a été labellisé en 2000. Nous avons aujourd’hui deux laboratoires (recherche fondamentale et recherche appliquée) et sommes très actifs sur les brevets et les marques déposées. Le premier brevet a été déposé il y a une vingtaine d’années avec Eurocopter pour le développement d’un moteur léger. L’école a une vingtaine de brevets actifs ; ils sont déposés soit en partenariat avec les entreprises, soit en propre. Nous avons aussi quelques marques déposées qui sont moins chères à développer. En termes de valorisation, nous avons mis en place en 2007 au niveau comptable une organisation baptisée ING4 (ingénierie technologique, ingénierie de R&D, ingénierie d’innovation et ingénierie de formation). En 2008, ING4 a dégagé 483 000 euros de chiffre d’affaires en vente de services en activité équilibrée. Dès l’année prochaine, une fondation universitaire sera créée au sein de l’ENISE, dont l’ING4 constituera le “ fonds de commerce ”. »

 

L’ENISE, membre du groupe ENI
Le groupe ENI compte cinq écoles nationales d’ingénieurs dont quatre « historiques » fondées en 1961 (Metz, Brest, Tarbes et Saint-Étienne) et une en 2006 (Blois), celle de Belfort n’existant plus. Il représente au total 950 diplômés par an, ainsi que 25 000 anciens. Au sein du groupe ENI, les cinq écoles partagent des moyens et valeurs communs : la communication et le recrutement des élèves ingénieurs, les standards de formation, les relations internationales, les relations avec les entreprises, la recherche.

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