Le sport business fait partie des secteurs privilégiés pour lesquels la crise économique n’existe pas. Au cours des trois dernières années, les difficultés se résumaient à une relative stagnation des recettes professionnelles, à peine perceptible. En 2012, elles reprennent de plus belle leur ascension avec une croissance de 9,5 %, pour atteindre la barre des 100 milliards d’euros. C’est la conclusion d’une étude publiée en 2011 par le cabinet de conseil PricewaterhouseCoopers. Les deux événements majeurs de l’été, le championnat d’Europe de football et les jeux olympiques de Londres, jouent bien sûr un rôle essentiel dans ces chiffres.
Les recettes des budgets olympiques, en particulier, n’en finissent pas de croître. La vente des droits de retransmission a apporté un peu plus de 750 000 euros dans le cas des jeux de 1960 à Rome, quelques 215 millions d’euros lors des jeux de 1984 à Los Angeles et plus d’un milliard d’euros à l’occasion de l’olympiade d’Athènes en 2004. Les principaux sponsors du CIO (Comité international olympique) deviennent également de plus en plus généreux : pour le cycle olympique Calgary – Séoul (1985 – 1988), ils ont versé 72 millions d’euros, contre 649 millions d’euros pour le cycle Turin – Pékin (2005 – 2008).
L’Amérique du nord pèse pour 41 % de l’ensemble du chiffre d’affaires de l’économie du sport, contre 35 % pour l’Europe et le Moyen-Orient, 19 % pour la région Asie-Pacifique, et 5 % pour l’Amérique latine. La bonne santé économique du domaine s’inscrit dans le temps et n’est pas simplement tirée par des événements isolés à forte audience. L’enquête de PricewaterhouseCoopers révèle que le marché mondial du sport devrait connaître une croissance annuelle moyenne de 3,7 % d’ici à 2015. La progression annuelle moyenne serait même de 4,7 % hors incidence des événements sportifs majeurs. Exprimée en euros, l’expansion de ce secteur atypique – hors équipementiers – est particulièrement impressionnante. Les recettes sont évaluées à 109 milliards d’euros à l’horizon 2015. Elles avoisinaient les 91 milliards en 2010, année pourtant marquée par la Coupe du monde de football en Afrique du Sud.
Le sport business est un vaste secteur comprenant des recettes de billetterie, des partenariats noués avec les annonceurs (sponsoring), la commercialisation des droits médias, et enfin les ventes de produits dérivés (merchandising). Au-delà des montants brassés, le modèle à succès de cette économie semble en train de changer. Les recettes du sponsoring, en particulier, qui représentaient 26 milliards d’euros en 2010, devraient progresser rapidement pour atteindre 34 milliards d’euros en 2015. Le sponsoring représente désormais autant de recettes que la billetterie, alors que cette dernière a toujours constitué le principal revenu. En 2010, année de coupe du monde de football, on comptait 29 milliards d’euros pour la billetterie et 26 milliards pour le sponsoring. Ce dernier est un segment en fort développement, grâce notamment l’essor de son audience sur les réseaux sociaux. Le développement spectaculaire du Web 2.0, qui peut être aussi bien un outil de conquête de nouveaux clients que de fidélisation, forme un phénomène essentiel à prendre en compte au cours des années futures. La billetterie, qui génère au total 32,6 % des recettes, apparaît désormais comme une activité mature en Amérique du Nord et en Europe.
Parmi les segments en croissance figurent bien sûr les retransmissions des événements. Les droits TV affichent une hausse importante, en passant de 22 milliards à plus de 26 milliards d’euros entre 2010 et 2012. Une augmentation accompagnée par la diversification des chaînes et des modes de diffusion. « La multiplication des canaux de diffusion donne une nouvelle place à certains sports ou à certains niveaux de compétition. En France, l’apparition des chaînes de la TNT a permis une meilleure médiatisation du football féminin que l’on peut désormais trouver aussi bien sur Direct8 que sur Eurosport. De nouveaux espaces peuvent ainsi apparaître pour les annonceurs. Des droits TV supplémentaires s’échangent d’ores et déjà, même si les montants en jeu sont bien inférieurs aux contrats signés pour les événements sportifs majeurs. C’est en quelque sorte une nouvelle économie qui se met en place », décrit Vincent Chaudel, conseiller en management du sport au sein du cabinet de conseil Kurt Salmon.
Le sponsoring en pleine évolution
Selon l’association des acteurs de l’économie du sport Sporsora, 61 % des marques en France anticipent un maintien ou une hausse des budgets de sponsoring sportif. Les deux tiers considèrent ce type de marketing comme un pilier de leur stratégie actuelle. 80 % d’entre elles ont un budget spécifique dédié à ces actions de promotion de leur notoriété. Même en temps de crise, et à l’heure de la rationalisation des coûts, 61 % des annonceurs prédisent une hausse ou au moins une stabilisation de ces budgets. 66 % des organisations qui utilisent déjà ces modes de communication leur conservent leur confiance, en dépit des difficultés économiques.
Cette étude de Sporsora a été réalisée en février 2012 auprès d’un fichier 5 000 grands annonceurs français. Elle regroupe les expériences de sponsoring des 150 plus importants annonceurs de l’Hexagone, parmi lesquels se trouvent Groupama, Peugeot, ou encore Veolia. Nombreuses sont les marques d’envergure à avoir annoncé dernièrement leur volonté de réduire, voire de couper totalement leurs investissements de marketing sportif. À en croire les conclusions de l’enquête, ce phénomène resterait marginal. Les deux tiers des entreprises sondées affirment d’ailleurs qu’en période de difficultés, il est important de maintenir voire de renforcer le sponsoring et le mécénat. 76 % d’entre elles estiment que ces modes de communication sont différents des autres types d’expression. Autre élément important de l’étude : à l’heure où la notion de retour sur investissement prend de l’importance, les annonceurs distinguent clairement le sponsoring du mécénat. Pour 60 % des sociétés, la première notion est perçue comme un mode de communication. Pour 62 % d’entre elles, le mécénat est identifié comme l’expression de la citoyenneté.
Dans ce contexte de changement, de nouvelles catégories de sponsors émergent comme le géant des produits de grande consommation Procter & Gamble (Ariel, Pampers, Gillette, Head & Shoulders…). Le groupe profite des jeux olympiques de Londres, dont il est l’un des partenaires, pour s’afficher en tant que « sponsor des mamans ». La filiale française a fait savoir que « les consommateurs ont besoin de transparence et veulent découvrir les entreprises derrière les marques. » L’entreprise mise donc sur cet événement pour sortir de l’ombre. Durant les jeux, à travers son partenariat avec le Comité international olympique et des comités nationaux mais aussi les liens noués avec environ 200 athlètes, le groupe se chargera des photos de famille en invitant dans la capitale britannique 2 000 mères d’athlètes de tous les pays. Le développement du secteur passe aussi par la préservation de l’intégrité du sport, et donc la lutte contre la triche et la fraude, ce qui peut contribuer à attirer de nouvelles marques.