JO 2012 : les champions de l’ombre

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Dans l’ombre des marques historiquement attachées aux jeux olympiques, de nombreuses entreprises génèrent des profits gigantesques, à court ou long terme, du fait de leur implication dans l’événement londonien.

 

Coca-Cola, Adidas et d’autres marques mondialement connues figurent sans doute parmi les premiers des bénéficiaires des jeux olympiques, l’événement étant incontournable pour asseoir leur hégémonie. Mais les grands gagnants sont loin de se résumer à une poignée d’acteurs de ce type. Selon le Locog, le comité d’organisation des JO de Londres, la préparation de l’olympiade britannique a profité à quelques 1 500 entreprises du pays qui se sont partagées un pactole de 8,7 milliards d’euros de contrats. Ce sont même des sociétés de tous horizons qui profitent du potentiel de l’événement, bien au-delà des frontières nationales.

Atos Origin fait partie des grands bénéficiaires méconnus de l’aventure. Responsable du système d’information des JO depuis 2002, la société de services informatiques française est notamment en charge des tests informatiques destinés à vérifier le bon fonctionnement de l’infrastructure technologique pendant l’événement. Installé sur deux étages d’une tour du quartier financier de Canary Wharf, le laboratoire se veut une réplique technologique miniature des 36 sites qui accueillent les épreuves. Une équipe de 200 personnes a fait tourner pendant de longs mois quelques 800 ordinateurs et 130 serveurs sur une surface de 2 000 mètres carrés. Environ 200 000 heures de tests ont été réalisées. Tous les scénarios sont imaginés, même les plus extrêmes. En tant qu’intégrateur principal, Atos Origin est à la tête d’un consortium de 8 entreprises high-tech, dont Acer (ordinateurs et serveurs), Panasonic (équipements vidéo), British Telecom et Cisco (réseau). La SSII française a au fil du temps acquis l’expérience nécessaire pour ce genre de défi technologique. Depuis 2002 et les jeux olympiques d’hiver de Salt Lake City, elle est un partenaire officiel du CIO pour la gestion de l’infrastructure technologique de l’événement. La société a gagné trois appels d’offres successifs face aux grands groupes informatiques mondiaux. Le montant des contrats n’est pas rendu public. Mais Atos Origin assure que le bénéfice réside avant tout dans la formidable vitrine commerciale que représentent les jeux. Être capable de gérer un projet d’une telle complexité offre des garanties fortes aux clients. Le partenariat avec les JO contribue au total à une augmentation du chiffre d’affaires de près de 500 millions d’euros par an pour le groupe. L’organisation des jeux à Pékin en 2008 avait permis à l’entreprise d’accélérer son implantation en Chine.

 

Un « effet JO » depuis le début de l’année

Eurotunnel profite également de l’événement londonien pour passer à la vitesse supérieure. Une rame supplémentaire est mise en service en juillet. La vitesse de traversée sous la Manche passe à cette occasion de 140 à 160 kilomètres à l’heure et fait passer la durée de voyage souterraine de 35 à 30 minutes. La capacité de transport augmente d’environ 10 %. La grille horaire sera densifiée avec jusqu’à cinq départs par heure et par sens. Une façon de rendre le lien transmanche plus attractif et plus compétitif. Un « effet JO » s’est déjà fait sentir depuis le début de l’année, avec une petite hausse du trafic de camions pour des livraisons d’équipements et des reconnaissances de terrain. La mise en route de la rame supplémentaire permet aussi d’accompagner une tendance à la hausse du trafic passager. Il affichait une augmentation de 11 % au premier trimestre 2012. Eurotunnel accueillera d’ailleurs prochainement son 300 millionième voyageur depuis sa mise en service en 1994. La compagnie, filiale à 55 % de la SNCF, transportera notamment les délégations française et belge dans leur voyage vers la capitale britannique. Plus largement, une campagne de publicité télévisée est chargée de populariser la collaboration d’Eurostar à l’événement. Une façon pour la compagnie ferroviaire d’accroître sa notoriété, mais aussi de se différencier de la concurrence « low cost » menaçante par autocar qui est récemment apparue pour se rendre en Grande-Bretagne. L’exploitant du tunnel sous la Manche a eu l’autorisation d’afficher au-dessus de l’entrée française les anneaux olympiques. Il s’agit de la première fois que ceux-ci peuvent être utilisés hors du pays d’accueil des JO. Les touristes sont attendus en nombre depuis la France et la Belgique, sans compter les spectateurs non européens, qui prolongeront leur séjour sur le continent. Bon nombre de délégations ont également choisi la France comme base arrière.

 

EDF parmi les protagonistes

Autre société pour laquelle on n’imagine pas spontanément d’importantes retombées : Ikea. Le géant suédois du meuble construit et aménage intégralement un quartier de Londres dans l’esprit de la célèbre entreprise. Les bâtiments sont destinés aux familles plutôt qu’aux grandes fortunes. C’est en tout cas ce qu’a annoncé la société immobilière Landprop Services, associée au projet. Les deux entreprises se sont unies pour mener à bien cette ambitieuse initiative. En 2009, LandProp Services avait acheté Strand East, un territoire de 26 hectares, pour plus de 30 millions d’euros. Parmi les détails du projet figure notamment l’intention d’implanter un hôtel, environ 1 200 habitations ainsi que 480 000 mètres carrés d’espaces de bureaux sur cette même zone. Une fois installé, le nouveau Strand East devrait étendre le quartier londonien de Stratford dans lequel se déroulent les jeux olympiques.

Côté français, l’un des grands bénéficiaires est également la société GDF Suez. Ces olympiades 2012 ont été l’occasion pour Londres de construire au cœur du parc olympique une vaste centrale énergétique dans la tradition architecturale victorienne. Le groupe français a été l’heureux élu choisi pour construire le bâtiment. Dessinée par Arran Pexton et John McAslan, l’édifice comprend notamment une tour impressionnante de 45 mètres, et rappelle la centrale de la rive sud de la Tamise. Équipée pour la génération de chaud, de froid et d’électricité, elle est modulable pour alimenter après l’événement une partie du nord-est de Londres. Les sous-stations installées dans les grands bâtiments du site olympique seront démontées et réinstallées plus tard en vue de leur réutilisation dans la zone. Avec un deuxième site à l’est du parc olympique, ces centrales pourront couvrir les besoins d’environ 20 000 foyers, tout en réduisant les émissions de CO2 d’au moins 20 %. L’accord signé profite en fait à Cofely, la filiale britannique de Suez responsable de ces métiers, qui détient une concession de 40 ans. Avec environ 1,5 milliard d’euros, le montant du contrat représente des revenus records. En marge du groupe GDF Suez, on trouve aussi le Français EDF parmi les protagonistes. L’entreprise est sponsor des JO, et gère l’alimentation en électricité du village olympique et des 23 infrastructures du parc olympique. L’hôtellerie, la restauration ou encore les détaillants haut de gamme constituent d’autres secteurs d’activité qui profitent de répercussions positives des différents événements sportifs. À court terme, mais aussi à long terme, car 4,5 millions de touristes supplémentaires devraient se rendre à Londres au cours des 4 prochaines années, selon les estimations de l’attractivité générée par les jeux olympiques.

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