France: les multinationales dans le viseur

97
La pression fiscale supportée par les PME est bien plus importante que celle des groupes du CAC 40.

 
En France, plus les entreprises sont grandes et moins elles s’acquittent de l’impôt sur les sociétés (IS), conclut un rapport parlementaire publié en juillet dernier. Pour Gilles Carrez, le rapporteur général du budget à l’Assemblée nationale, cette situation pourrait être corrigée en modifiant certains mécanismes jugés trop avantageux. Il recommande notamment de revoir le régime des « prix de transfert », qui régit les transactions internationales entre les différentes entités d’une multinationale, ainsi que celui du report des déficits.

« La pression fiscale réelle sup-portée par les petites entreprises est de 20 points plus importante que pour les grands groupes », constate le rapporteur, un « décrochage qui s’opère à l’échelle des grands groupes internationalisés », précise-t-il. Ainsi, le taux moyen « implicite » de l’impôt sur les sociétés payé par les plus grands groupes français n’est que 18,6 % contre 39,5 % pour les petites et moyennes entreprises et 27,5 % en moyenne pour l’ensemble des sociétés. En France, le taux facial de l’impôt sur les sociétés (IS) est fixé à 33,3 %. Toutefois, les spécialistes prennent comme référence le taux « implicite », c’est-à-dire l’impôt payé rapporté à l’excédent d’exploitation (Ebitda).

Le rapport souligne que les entreprises qui dégagent plus de 2,5 milliards d’euros de chiffre d’affaires ne paient que 15 % à 20 % des recettes totales de l’IS alors qu’elles représentent 50 % à 70 % du chiffre d’affaires global. Dix milliards d’euros au total ont été versés par ces grandes sociétés entre 2007 et 2009 au titre de l’IS, crédits d’impôt compris. Soit 86 millions d’euros par groupe et par an, représentant seulement 0,4 % en moyenne de leur chiffre d’affaires réalisé en France. Pour quatre d’entre elles, le montant de l’IS a même été nul entre 2007 et 2009.

Les quatre entreprises dont l’État est actionnaire (France Télécom, EDF, GDF Suez et Renault) font figure d’exception, avec un taux d’IS brut de 40 %. Selon Gilles Carrez, ce différentiel d’imposition s’explique par l’existence de niches fiscales dont profitent les grands groupes. Il évoque la déductibilité des charges financières du résultat imposable ou le report illimité des déficits.

Sans remettre en cause l’exonération des dividendes versés par les filiales aux maisons mères et celle des plus-values sur les participations, le rapport de l’Assemblée juge urgent de travailler sur certains mécanismes de déductions de charges. D’un point de vue économique, l’enjeu est d’importance à l’heure où les pays européens se lancent dans une course au désendettement. L’IS devrait rapporter au total environ 45 milliards d’euros à l’État cette année, contre 52,2 milliards pour l’impôt sur le revenu et 130,9 milliards d’euros pour la TVA.

Mais l’enjeu est également politique. En début d’année, l’opinion avait été choquée d’apprendre que Total ne payait pas l’IS en France malgré un bénéfice net annuel de plus de 10 milliards d’euros. Une polémique qui pourrait reprendre de l’ampleur à l’approche de l’élection présidentielle de mai 2012.

Article précédentSchneider Electric optimise la consommation énergétique en conciliant les besoins et les contraintes
Article suivantRencontre avec, André Marcon, président de l’ACFCI