French Prime Minister Edouard Philippe (L) speaks following a report by French economist Jean Pisani-Ferry on the Grand Investment Plan for 2018-2022 on September 25, 2017 at the Hotel Matignon in Paris. / AFP PHOTO / CHRISTOPHE SIMON

 Emmanuel Macron l’avait promis au cours de sa campagne: à coté de son programme d’économies, un programme d’investissement devait voir le jour pour booster l’économie française. Le programme a été dévoilé Lundi 25 Septembre par le Premier Ministre Edouard Philippe qui souhaite «accélérer l’adaptation de la France aux enjeux du 21ème siècle», et la priorité donnée est sur la transition écologique et la formation.

À seulement 48H du projet de loi de finances 2018, qui régira les enveloppes attribuées pour chaque ministère, la présentation du plan d’investissement est essentielle pour Emmanuel Macron et orientera énormément l’action au cours du quinquennat. Le concepteur du plan et économiste Jean Pisani-Ferry rappelle que «la dépense publique est trop élevée, mais on ne traite pas le problème en faisant chaque année un coup de rabot supplémentaire». Matignon veut montrer que des coupes budgétaires seront faites dans les dépenses publiques ainsi que des réformes radicales.

Bercy a du négocier depuis des semaines avec chaque ministère, et Matignon a du arbitrer et ajuster les derniers éléments du plan dans la nuit de dimanche à lundi. La priorité a été donné à la transition écologique avec 20 milliards d’euros alloués, la formation recevra une enveloppe de 15 milliards d’euros, la compétitivité avec la prolongation du programme d’investissement d’avenir prendra 13 milliards d’euros, et la transformation numérique de l’État recevra 9 milliards d’euros de budget. L’exécutif a ajusté l’ordre des priorités depuis la campagne présidentielle et souhaite relever des défis tel que la mise en place d’une économie au bilan carbone neutre d’ici 2050. Jean Pisani-Ferry explique qu’il est aussi question de «répondre à nos retards, sur l’emploi et la productivité»

Son concepteur veut favoriser la prise de risque de l’État

M. Pisani-Ferry continue «Il y a trente ou quarante ans, l’Etat prenait des risques. Ce fut le cas avec le programme électro-nucléaire ou le Minitel. Mais depuis, ce n’est plus le cas. L’Etat est devenu extraordinairement «court-termiste», à l’exception des plans d’investissements d’avenir. L’idée du plan est de rétablir une culture de l’innovation et du long terme dans la sphère publique.»

Sur les 57 milliards, seulement 24 milliards d’euros seront vraiment nouveaux. «Il est difficile de dire ce qu’aurait été la loi de programmation des finances publiques et le PLF sans le plan d’investissement : par exemple, le ministère du travail sait bien que sans le volet formation, son budget n’aurait pas été le même» selon M. Pisani-Ferry. Le PLF et le projet de financement de la Sécurité sociale comprendront 7 milliards pour 2018, le plan devant gagner en importance sur le quinquennat.

La transition écologique reprend essentiellement le plan que Nicolas Hulot avait annoncé le 18 septembre (avec en ligne de mire la rénovation des logements anciens trop coûteux en énergie, la prime à la casse pour les vieux véhicules, etc.). Le gouvernement veut augmenter les investissements pour atteindre la neutralité carbone estimée entre 0,5 et 1 point de PIB (10 à 20 milliards d’euros).

La seconde partie des investissements consiste en un plan de formations dites de longue durée (entre 6 mois et un an). Il ne s’agit pas de la réforme de la formation qui s’attaquera elle au dysfonctionnement du système. Les cibles sont les deux millions de chômeurs à faible qualification. «Nous estimons qu’à l’horizon 2022, 300 000 personnes supplémentaires pourraient être insérées durablement dans l’emploi», explique M. Pisani-Ferry

33 milliards d’euros alloués en 2015 par le gouvernement Valls seront réorientés pour le plan du gouvernement Philippe

La compétitivité reprend les montants alloués en 2015 pour le dernier programme d’investissement mis en place par le gouvernement Valls, le plan sera renforcé par des mesures sur l’agriculture, qui seront fixées en novembre après les états généraux de l’alimentation.

Le quatrième et dernier volet du plan concerne la réforme numérique, avec une amélioration de l’organisation de la santé, et prévoit une multiplication par deux des maisons de santé (environ un millier à l’heure actuelle).

Profitant des taux d’emprunts bas, le gouvernement Philippe souhaite en profiter pour financer le plan. Bpifrance et la Caisse des Dépôts et Consignations seront aussi mises à contribution à hauteur de 11 milliards d’euros. La Banque européenne d’investissement sera sollicitée pour des coopérations avec le secteur privé. Seul 30 milliards d’euros supplémentaires seront inscrits dans le budget du quinquennat compte tenu de la réorientation de crédits déjà existants.

Les nouveaux crédits alloués pour le plan seront divisés entre les différents ministères, mais leur répartition évoluera au cours du quinquennat. Tous les ans, les actions seront évalués et en fonction des évolutions le financement pourra changer d’attribution. Jean Pisani-Ferry explique : «Nous sommes dans une logique de résultats, pas de moyens». Ainsi, le plan de formation sera évalué dès 2019, «par exemple en mesurant les chances d’accès à l’emploi des bénéficiaires six mois après la fin de leur formation» précise t-il.

Une Banque de réforme de l’État pour gérer l’engagement des crédits

Les fonds seront délivrés par une nouvelle structure. M. Pisani-Ferry explique qu’il faut une «Banque de réforme de l’État», le fond sera doté de 700 millions d’euros. En élaborant son plan, ce dernier a constaté que l’État n’avait «pas l’habitude de fonctionner en termes d’investissement», ce qui engendre des difficultés dans l’engagement des crédits. L’objectif de la banque sera de financer les projets des ministères puis de se rembourser sur les économies réalisés.

 

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