DIHK – Financement des entreprises : l’ombre de Bâle III plane sur les PME

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Elaborés dans le sillage de la crise financière de 2008 pour prévenir les faillites bancaires, les nouveaux standards et les normes de régulation édictent, sous le nom de Bâle III, un durcissement des ratios de solvabilité et la mise en place de ratios de liquidité. Mais ce qui est bon pour les banques l’est beaucoup moins pour leurs clients, les PME qui craignent désormais de se voir refuser les crédits nécessaires à leur développement.

 

Des taux d’intérêts historiquement au plus bas et une concurrence bancaire exacerbée composent actuellement un environnement financier favorable pour les entreprises allemandes. Seules 15% d’entre elles, y compris celles de moins de 500 salariés, déclarent connaitre aujourd’hui des difficultés de financement. Ce constat issu d’une enquête menée par la DIHK, la fédération des chambres de commerce allemandes, n’en est pas moins accompagné d’un autre aveu : Bâle III assombrit l’avenir des chefs d’entreprise allemands. Ils craignent en effet d’être rattrapés par ce nouveau cadre réglementaire, destiné au secteur bancaire, qui introduit des contraintes plus strictes en matière de capital propre et de liquidités. 

 

Car, selon une projection de la fédération des PME et entreprises de structures familiales ( BVMW*), pour un crédit de 10 millions d’euros, Bâle III augmenterait les exigences en matière du noyau dur des fonds propres de base (common equity) de 250 % et les besoins en fonds propres de base de 112,5 %, soit respectivement des niveaux de 700 000 euros et de 850 000 euros  !  S’appuyant sur une étude des universités de Berlin et de Wuppertal, la BVMW affirme que Bâle III induira une diminution de 2,74% du volume des crédits accordés. Et amputera de 2 % la performance économique des PME !

 

 


Vers une érosion des fonds propres

Les PME, et tout particulièrement les start-ups, sont les premières à redouter que leur banquier ne les suive plus dans leurs financements à long terme. Ces incertitudes sont encore plus affirmées par les entreprises fortement impliquées en R&D, par celles nécessitant des investissements high-tech importants ou encore par les entreprises de moins de dix salariés, principale source de créations d’entreprise. Pour ces entreprises, Bâle III complexifie et supprime les crédits nécessaires au financement de leur développement. „Avec pour conséquence, que ces entreprises devront financer par leurs capitaux propres leurs investissements et leurs innovations“, notent  Marc Evers et Sebastian Schütz en conclusion de l’enquête de la DIHK.

 

Du reste, d’autres branches plus traditionnelles se disent elles aussi,  inquiètes par les effets de Bâle III, notamment par le risque de se voir refuser les crédits à long terme nécessaires à l’achat de biens de production, par exemple.

Or, déjà, les constructeurs automobiles et le secteur des medias/nouvelles technologies affirment subir un ralentissement de leurs ventes et les pressions du marché, ce qui pourrait entamer à terme leur potentiel de financement. Les constructeurs aéronautiques et les chantiers navals témoignent eux aussi d’une récente réticence des banques à leur accorder des volumes de crédit importants sur le long terme.  La toute puissante construction mécanique elle-même se déclare inquiète.

 

Pour l’heure, l’ensemble de ces entreprises disposent de fonds propres et de liquidité suffisants deux „trésors de guerre“ qui leur ont permis de surmonter la crise. Selon la Bundesbank, 28,2 % des entreprises ont un taux de capitaux propres supérieur à 30 %. Ce qui ne les empêche pas de craindre une érosion de leur assise financière face à la menace que représente Bâle III.

 

 

Une première victoire

Ces craintes ne sont pas récentes.  En 2011 déjà, un groupement de PME  avait mis le doigt sur les risques que comporte l’application en droit européen de Bâle III. Au-delà des risques pesant sur leur financement à long terme, ces PME avaient dénoncé les conséquences sur les exportations et les activités commerciales en général qu’entrainerait cette fragilisation des systèmes de cautions et de garanties bancaires.

Pour autant, les PME allemandes viennent d’obtenir une première satisfaction auprès de leur gouvernement. Berlin s’est engagé „à prendre en considération dans l’ application nationale du cadre réglementaire les spécificités propres aux  petites et moyennes entreprises, ainsi qu’aux caisses d’épargne“, se félicite Mario Ohoven, président de la BVMW. Et de poursuivre „il reste désormais à faire respecter le calendrier d’application dans le but d’une stabilisation du secteur bancaire.“ Et ce avant les élections législatives de septembre prochain. 

 

*Bundesverbandes mittelständische Wirtschaft 

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