Canne à sucre, soleil, eau, vent, vagues… L’île Maurice présente tous les atouts pour assurer son avenir énergétique et environnemental. C’est, en tout cas, l’ambition du gouvernement avec le projet « Maurice île durable » (MID), initié en 2008. Une volonté politique continue, puisqu’en mai dernier, le renouvellement de l’équipe gouvernementale s’est accompagné de la création d’un ministère de l’Environnement et du Développement durable qui doit piloter le MID. Il s’agit de rendre Maurice moins dépendante des énergies fossiles grâce aux énergies renouvelables et aux économies. L’objectif du gouvernement est une augmentation de 35 % des énergies renouvelables d’ici à 2025.
Le projet aborde une large palette d’actions : création d’énergies renouvelables et non polluantes, nouvelles normes de haute qualité environnementale pour les constructions, gestion et élimination des déchets, généralisation des ampoules économiques, contrôle des CO2 et de la pollution automobile, promotion des transports collectifs… Un fonds spécial (MID Fund), avec 1,3 milliard de roupies (soit 33,5 millions d’euros) a été créé en 2008, placé sous l’égide du ministère des Services publics. Depuis, plusieurs actions ont été lancées, comme le financement de chauffe-eau solaires, les ampoules basse consommation, la réduction de taxes sur les voitures hybrides, le recyclage des eaux usées, la création d’une ferme éolienne et de deux stations hydroélectriques. Le MID vise à réunir population, associations et pouvoirs publics, mais aussi industrie et services mauriciens – dont les efforts environnementaux se sont intensifiés depuis quelques années. L’enjeu est de taille pour une île consciente de sa vulnérabilité face à la dégradation environnementale dans le monde. L’État entend aussi préserver la biodiversité et l’environnement, afin de préserver le tourisme, pilier de son économie.
« Le projet est vécu comme une réelle opportunité de se positionner en destination verte », affirme Michel Gauthey, responsable de l’Agence française de développement (AFD) à Port-Louis, qui soutient le projet MID. Une consultation nationale a été lancée en février 2010 et un livre blanc servira en fin d’anné à définir la politique nationale. « La Chambre de commerce de Maurice (MCCI) a pleinement participé aux consultations et à la campagne de sensibilisation du MID », explique Cédric de Spéville, vice-président de la MCCI. « Nous avons formulé certaines propositions, dont celle de l’urgence de débloquer les fonds afin de financer des mesures incitatives pour les entreprises, telles que la gestion de leurs déchets industriels, la maîtrise de la demande énergétique (MDE), le recyclage, l’aide technique pour une gestion efficiente de l’énergie (ISO 50000) et la réduction de leur empreinte écologique ainsi que la formation du personnel. » Organisation multisectorielle qui vient de fêter ses 160 ans d’existence, la MCCI encourage ainsi les entrepreneurs à adhérer au développement durable. « Ils ont énormément à y gagner », remarque Cédric de Spéville.
Avec 40 millions d’euros de crédits financés par l’Agence française de développement (AFD) pour des prêts verts, les futurs investisseurs devraient être encouragés à tenir compte des questions environnementales dans leurs projets. « Lorsque qu’un pays fait montre d’une volonté politique affirmée, l’AFD l’appuie avec des instruments budgétaires. Et l’on essaie de soutenir le secteur privé dans le même sens. L’un ne va pas sans l’autre, sinon ça ne fonctionne pas ! », s’exclame Michel Gauthey. Et comme l’explique le vice-président de la MCCI, les mesures incitatives pour les entreprises ont beaucoup plus de succès que les sanctions. « Recourir aux taxes ciblées (carburant, piles, sacs en plastique, etc.) pour financer des mesures incitatives est très efficace », indique-t-il. Outre les efforts énergétiques, certaines entreprises mènent des campagnes internes de prise cons-cience du personnel. « Plusieurs entrepreneurs ont mis en place diverses normes de management environnemental au sein de leurs sociétés », ajoute Cédric de Spéville. « D’autres ont aussi compris qu’il peut s’avérer rentable de produire plus cher proprement, plutôt que moins cher sans respecter l’environnement. On observe un changement des habitudes de consommation à Maurice, avec de plus en plus de personnes éco-responsables. » Le MID est ambitieux, mais Maurice a les atouts. Les universités de Yale et Columbia (USA), évaluant les performances écologiques de 163 pays, place Maurice au 6e rang des pays les plus propres du monde. Reste à préserver les ressources et faire de ces performances une qualité pérenne.