Débat autour de la fiscalité verte en France

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Déjà mise en place dans plusieurs pays européens, la taxe carbone pourrait devenir une réalité française à partir de 2011.

 

La France a relancé le débat sur une fiscalité verte. Le 10 juin, le gouvernement a présenté le Livre blanc de la Contribution climat énergie (CCE, dite « taxe carbone »). Proposée par Nicolas Hulot dans son pacte écologique reprise dans le Grenelle de l’environnement, l’instauration d’une CCE vise à taxer les consommateurs des énergies les plus émettrices de gaz à effet de serre, responsables du changement climatique. Une conférence de consensus début juillet sera suivie autour du 10 juillet d’une table ronde réunissant les personnalités qualifiées. Mais le ministre français de l’Écologie Jean-Louis Borloo a prévenu qu’il n’y aura pas de taxe carbone en France avant 2011. « Il est sain que la CCE ait été reportée à 2011. À l’heure actuelle, les objectifs de cette nouvelle taxe paraissent flous, estime Thérèse-Anne Amy, avocate Fiscalité douanière au sein du cabinet Baker et McKenzie. Il a été dit qu’elle viendrait compenser la suppression de la taxe professionnelle. Si le consommateur doit supporter la CCE, il est essentiel que les prix affichent le niveau de taxation de façon transparente et que sa destination réponde à un objectif de lutte contre les pratiques polluantes ou de protection de l’environnement, car cela “ faciliterait ” son acceptabilité. Il faut que la taxe soit affichée sur les prix des produits polluants afin que les consommateurs aient conscience de ce qu’ils achètent. Une vision claire de la fiscalité induira des comportements vertueux. »
L’exemple suédois
L’Hexagone ne sera pas le premier pays européen à introduire une telle fiscalité. Dès le début des années 1990, plusieurs pays nordiques l’ont adoptée. La Finlande a été la première nation, suivie un an plus tard par la Suède et la Norvège, puis en 1992 par le Danemark. L’exemple suédois est cité dans le Livre blanc du gouvernement français. En compensant la mise en place d’une fiscalité environnementale par une baisse de la fiscalité sur les facteurs de production, la Suède a appliqué la théorie du « double dividende ». Le montant de la taxe a été multiplié par quatre en quinze ans, pour atteindre 109 euros par tonne. Elle rapporte entre 2,5 et 3 milliards d’euros par an.

 

La règle du pollueur-payeur
« Une autre piste est à envisager : appliquer le principe du protocole de Kyoto et des quotas carbone aux distributeurs et aux producteurs en l’étendant à tous les secteurs. Un système dans lequel les distributeurs auront intérêt à augmenter les volumes de ventes des produits non polluants, avance Cyril Maucour, avocat Fiscalité internationale chez Baker & McKenzie. Cela serait lisible pour les consommateurs et permettrait le développement de produits de plus en plus neutres. Bien sûr, ce système implique une visibilité d’un bout à l’autre de la chaîne, et donc la mise en place d’agences gouvernementales pour contrôler le comportement des entreprises. » En Europe, un système de quotas par pays et par entreprises, avec une bourse aux « droits à polluer », a été mis en place depuis 2005. Le prochain rendez-vous sur le climat aura lieu en décembre à Copenhague. La France souhaite que, dans le cas d’un échec des négociations internationales, l’UE décide unilatéralement de taxer les produits importés n’ayant pas fait l’objet d’efforts de réduction des émissions de CO2. Mais la proposition ne fait pas l’unanimité.