Le Sénat américain a voté en faveur d’une loi qui permettrait aux États-Unis d’appliquer des taxes sur les importations chinoises. En effet, le texte proposé par un sénateur démocrate prévoit d’ajouter des taxes supplémentaires sur les biens importés de pays dont les devises sont « mal alignées ». En clair, le projet vise à doter les États-Unis d’un moyen de riposte face aux pays dont la monnaie est artificiellement sous-évaluée, soit avant tout face à la Chine.
Sans surprise, Pékin a immédiatement exprimé son hostilité à un texte « qui viole gravement les règles de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) », selon le ministère des Affaires étrangères chinois. De son côté, l’agence de presse officielle chinoise Xinhua a estimé que cette loi, si elle était votée par le Congrès américain et entérinée par le président Barack Obama, risquerait d’entraîner « une guerre commerciale ». Pékin pourrait, par exemple, renforcer les contraintes réglementaires pesant sur les entreprises américaines installées en Chine.
La Banque centrale chinoise a elle aussi vivement critiqué l’initiative américaine. Selon l’institution, « accuser sans fondement le taux du renminbi – la désignation officielle de la monnaie chinoise – ne résoudra pas le manque d’épargne des États-Unis, ni leur déficit commercial et leur taux de chômage élevé ».
En revanche, affirme la ban-que centrale, « cela pourrait sérieusement perturber la réforme du taux de change que mène actuellement la Chine ». Pékin a rappelé que, depuis juin 2010, sa monnaie s’était appréciée de 7 % face au dollar. Et si son excédent commercial a fortement augmenté avec les États-Unis ces dix dernières années, il tend plutôt à diminuer avec le reste du monde. Pour la deuxième économie mondiale, ce repli est le signe que le cours de sa monnaie est en voie de normalisation.
Mais la loi américaine pourrait inciter la Chine à faire cesser ce mouvement d’appréciation du renminbi. D’autant que, selon les observateurs, la poussée du yuan pénalise de façon croissante les industries exportatrices chinoises à faible valeur ajoutée confrontées à l’atonie de la demande sur les marchés développés. Aux États-Unis, si le projet des sénateurs recueille l’approbation d’un grand nombre d’électeurs, il a néanmoins très peu de chances de passer le Congrès. Les lobbies qui représentent la communauté des affaires, comme l’US Chamber, y sont opposés, estimant que ce texte risquerait de précipiter les États-Unis dans une guerre commerciale inutile avec la Chine.
Le porte-parole républicain du Congrès partage ce point de vue et juge le texte dangereux. Barack Obama n’a pas apporté son soutien au texte, qui peut contrevenir à des traités internationaux. Toutefois, il s’est montré particulièrement sévère envers le deuxième partenaire commercial des États-Unis derrière le Canada. « La Chine a été très agressive en jouant les avantages commerciaux à son avantage et au détriment d’autres pays, particulièrement les États-Unis », a déclaré le président. Nul doute que ce dossier sera évoqué lors du prochain G20 organisé à Cannes ces deux prochains jours.